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philosophies doit éclater chez la plupart des intelligences, trop peu touchées d’ordinaire des simples dissidences de méthode, quoique celles-ci soient au fond les plus graves, comme étant la source nécessaire de toutes les autres. Or, sous ce nouvel aspect, on ne peut méconnaître l’opposition radicale des deux ordres de conceptions, où les mêmes phénomènes sont tantôt attribués à des volontés directrices, et tantôt ramenés à des lois invariables. La mobilité irrégulière, naturellement inhérente à toute idée de volonté, ne peut aucunement s’accorder avec la constance des relations réelles. Ainsi à mesure que les lois physiques ont été connues, l’empire des volontés surnaturelles s’est trouvé de plus en plus restreint, étant toujours consacré surtout aux phénomènes dont les lois restaient ignorées. Une telle incompatibilité devient directement évidente quand on oppose la prévision rationnelle, qui constitue le principal caractère de la véritable science, à la divination par révélation spéciale, que la théologie doit représenter comme offrant le seul moyen légitime de connaître l’avenir. Il est vrai que l’esprit positif, parvenu à son entière maturité, tend aussi à subordonner la volonté elle-même à de véritables lois, dont l’existence est, en effet, tacitement supposée par la raison vulgaire, puisque les efforts pratiques pour modifier et prévoir les volontés humaines ne sauraient avoir sans cela aucun fondement raisonnable. Mais une telle notion ne conduit nullement à concilier les deux modes opposés suivant lesquels la science et la théologie conçoivent nécessairement la direction effective des divers phénomènes. Car une semblable prévision et la conduite qui en résulte exigent évidemment une profonde connaissance réelle de l’être au sein