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indispensable à nos divers efforts philosophiques, trop souvent attribués surtout aux impulsions pratiques, qui les développent beaucoup, il est vrai, mais ne pourraient les faire naître. Ces exigences intellectuelles, relatives, comme toutes les autres, à l’exercice régulier des fonctions correspondantes, réclament toujours une heureuse combinaison de stabilité et d’activité, d’où résultent les besoins simultanés d’ordre et de progrès, ou de liaison et d’extension. Pendant la longue enfance de l’Humanité, les conceptions théologico-métaphysiques pouvaient seules, suivant nos explications antérieures, satisfaire provisoirement à cette double condition fondamentale, quoique d’une manière extrêmement imparfaite. Mais quand la raison humaine est enfin assez mûrie pour renoncer franchement aux recherches inaccessibles et circonscrire sagement son activité dans le domaine vraiment appréciable à nos facultés, la philosophie positive lui procure certainement une satisfaction beaucoup plus complète, à tous égards, aussi bien que plus réelle, de ces deux besoins élémentaires. Telle est, évidemment, en effet sous ce nouvel aspect, la destination directe des lois qu’elle découvre sur les divers phénomènes, et de la prévision rationnelle qui en est inséparable. Envers chaque ordre d’événements, ces lois doivent, à cet égard, être distinguées en deux sortes, selon qu’elles lient par similitude ceux qui coexistent ou ― par filiation ― ceux qui se succèdent. Cette indispensable distinction correspond essentiellement, pour le monde extérieur, à celle qu’il nous offre toujours spontanément entre les deux états corrélatifs d’existence et de mouvement ; d’où résulte, dans toute science réelle, une indifférence fondamentale entre l’appréciation statique et l’appré-