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tiellement à l’École Polytechnique ou aux écoles de médecine. Il n’y a donc rien là qui soit vraiment particulier à nos prolétaires. Quant à leur défaut habituel de cette sorte de culture régulière que reçoivent aujourd’hui les classes lettrées, je ne crains pas de tomber dans une exagération philosophique en affirmant qu’il en résulte, pour les esprits populaires, un notable avantage, au lieu d’un inconvénient réel. Sans revenir ici sur une critique malheureusement trop facile, assez accomplie depuis longtemps, et que l’expérience journalière confirme de plus en plus aux yeux de la plupart des hommes sensés, il serait difficile de concevoir maintenant une préparation plus irrationnelle, et au fond, plus dangereuse, à la conduite ordinaire de la vie réelle, soit active, soit même spéculative, que celle qui résulte de cette vaine instruction, d’abord de mots, puis d’entités, où se perdent encore tant de précieuses années de jeunesse. À la majeure partie de ceux qui, la reçoivent, elle n’inspire guère désormais qu’un dégoût presque insurmontable de tout travail intellectuel pour le cours entier de leur carrière : mais ses dangers deviennent beaucoup plus graves chez ceux qui s’y sont plus spécialement livrés. L’inaptitude à la vie réelle, le dédain des professions vulgaires, l’impuissance d’apprécier convenablement aucune conception positive, et l’antipathie qui en résulte bientôt, les disposent trop souvent aujourd’hui à seconder une stérile agitation métaphysique, que d’inquiètes prétentions personnelles, développées par cette désastreuse éducation, ne tardent pas à rendre politiquement perturbatrice, sous l’influence directe d’une vicieuse érudition historique, qui, en faisant prévaloir une fausse notion du type social propre à l’antiquité, empêche