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cune, au fond, au lieu de se rapporter exclusivement à une certaine branche de la philosophie naturelle, dépend aussi plus ou moins de toutes les autres. Ainsi, l’universelle propagation des principales études positives n’est pas uniquement destinée aujourd’hui à satisfaire un besoin déjà très prononcé chez le public, qui sent de plus en plus que les sciences ne sont plus exclusivement réservées pour les savants, mais qu’elles existent surtout pour lui-même. Par une heureuse réaction spontanée, une telle destination, quand elle sera convenablement développée, devra radicalement améliorer l’esprit scientifique actuel, en le dépouillant de sa spécialité aveugle et dispersive, de manière à lui faire acquérir peu à peu le vrai caractère philosophique, indispensable à sa principale mission. Cette voie est même la seule qui puisse, de nos jours, constituer graduellement, en dehors de la classe spéculative, proprement dite, un vaste tribunal spontané, aussi impartial qu’irrécusable, formé de la masse des hommes sensés, devant lequel viendront s’éteindre irrévocablement beaucoup de fausses opinions scientifiques, que les vues propres à l’élaboration préliminaire des deux derniers siècles ont dû mêler profondément aux doctrines vraiment positives, qu’elles altéreront nécessairement tant que ces discussions ne seront pas enfin directement soumises au bon sens universel. En un temps où il ne faut attendre d’efficacité immédiate que de mesures toujours provisoires, bien adaptées à notre situation transitoire, l’organisation nécessaire d’un tel point d’appui général pour l’ensemble des travaux philosophiques devient, à mes yeux, le principal résultat social que puisse maintenant produire l’entière vulgarisation des connaissances réelles : le public rendra ainsi à la nou-