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SÉANCE DU 22 DÉCEMBRE 1913.

être considéré comme résultant de la réduction du pigment jaune qui se trouve normalement dans les feuilles vertes.

Cette nouvelle conception de la formation des pigments anthocyaniques, basée sur des faits nettement établis, est en contradiction complète avec toutes les opinions qui ont été émises jusqu’à ce jour sur cette question.

Le fait que le pigment jaune-brun contenu dans les feuilles vertes peut être transformé en pigment anthocyanique par réduction permettait de supposer qu’on pourrait effectuer la transformation inverse : passage du pigment anthocyanique au pigment jaune par oxydation. J’ai pu réaliser cette transformation.

Le pigment anthocyanique extrait des feuilles rouges de Vigne-vierge, purifié par deux cnstall.sations dans l’alcool et trois cristallisations dans l’eau, et dissous dans 1 alcool a 90°, donne une solution de couleur pourpre, qui, additiounée de son volume d eau oxygénée, passe peu à peu au rouge-brun, puis au jaune. De la solution jaune, ainsi obtenue, j’ai extrait un pigment jaune-brun cristallisé en aiguilles groupées en

rosettes.

Ce pigment jaune artificiel obtenu en partant du pigment anthocyanique naturel purifié par cristallisations dans l’alcool et dans l’eau, commence à se décomposer au’ bloc Maquenne à 18a» comme le pigment jaune naturel ; la fusion instantanée des deux corps a heu aussi à la même température, vers 2260-229°. Le pigment artificiel et le pigment nature), dissous en faible proportion dans l’alcool, donnent des solutions d un jaune clair dont la teinte n’est pas modifiée par addition d’un acide minéral 1 acide chlorhydrique par exemple. Les solutions des deux corps virent au jaune brun par alcahnisation au moyen de la soude ; avec la baryte, il y a, en outre, formation dun prec.pité jaune orangé. Les deux pigments sont précipités de leur solution en jaune serin par l’acétate neutre de plomb, en jaune orangé par l’acétate basique ; ils sont colorés en vert noirâtre par le chlorure ferrique ; ils ne sont pas précipités par le sulfate de zinc, le sulfate de cuivre, l’antipyrine et la caféine. Leur solution dans ieau ou l’alcool ne présente aucune modification de coloration par addition de bisulfite de soude.

La solution alcoolique du pigment jaune artificiel, traitée par l’amalgame de sodium en présence d’acide chlorhydrique, régénère le pigment anthocyanique rouge.

Il est donc possible, non seulement de réaliser, par réduction des pigments jaunes, la production expérimentale des pigments rouges, mais encore de passer des pigments rouges aux pigments jaunes, par oxydation. Ces résultats établissent, d’une manière définitive, que les pigments anthocyaniques ne résultent pas, comme on l’a supposé jusqu’ici, de l’oxydation de chromogènes ou de proanthocyanes préexistant dans les cellules. Ce n’est pas un phénomène d’oxydation, mais au contraire un phénomène de réduction qui est à la base de la formation des anthocyanes.