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question individuelle qu’en s’appuyant sur des observations faites sur d’autres hommes, par lui-même, ou par ceux qui l’ont précédé, et dont l’instruction lui a été transmise. Les résultats généraux peuvent sans doute ne point se vérifier dans un cas particulier : cela tient à la nature de la science, qui ne comporte pas de propositions absolues. On ne pense point sans doute qu’en appliquant les procédés de la statistique et le calcul des probabilités à la médecine, les résultats qu’on obtiendrait ainsi puissent être considérés comme des théorèmes de géométrie. On pense seulement qu’on donnerait plus de précision aux conséquences déduites des observations, et qu’on en rendrait l’application moins incertaine.

» Il ne lui paraît pas non plus que, par cette circonstance, que la plupart des médecins n’écrivant point, le plus grand nombre des faits échappe nécessairement aux recherches, on ne puisse tirer des conséquences utiles des observations qui auront été faites et enregistrées avec méthode et d’une manière entièrement impartiale. Car les phénomènes naturels étant nécessairement assujettis à des lois générales subsistantes, quoique trop souvent inconnues, il n’est pas indispensable de posséder la totalité des faits pour acquérir la connaissance des résultats de ces lois. Sans doute les conclusions seront d’autant plus assurées, que les observations seront plus nombreuses ; et c’est ici surtout que l’application du calcul des probabilités sera bien propre à fixer les idées, et, par la comparaison du nombre des faits observés et du nombre de ceux qui ne l’ont point été, à faire juger du degré de confiance avec lequel les résultats doivent être admis.

» Enfin la complication et la diversité des effets naturels, la variété des circonstances accidentelles, l’obscurité et la multiplicité des lois dont dépendent les phénomènes vitaux, l’impossibilité même de reproduire à volonté les faits qu’il s’agit d’observer, ne semblent pas non plus des motifs d’après lesquels la méthode sur laquelle on insiste doive être rejetée. Ces circonstances forment proprement le caractère de ces sciences qui ne peuvent être traitées que par la méthode d’observation. Il en résulte seulement l’obligation d’appliquer les procédés dont il s’agit le plus tôt et le plus généralement qu’il sera possible, parce que l’on voit qu’il sera nécessaire, pour arriver à des conséquences suffisamment précises, de multiplier beaucoup les observations, d’en recueillir avec soin tous les élémens, et de les classer avec une méthode prudente et sévère. L’étendue et la difficulté de cette tâche ne doivent point effrayer, si la vérité en est le prix. »