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Météorologie.Lettre de Ch. Texier à M. Arago sur le tremblement de terre qui s’est fait sentir à Césarée et dans ses environs.
Smyrne, le 15 septembre 1835.
Monsieur,

« Dans le rapport que j’eus l’honneur d’adresser l’année dernière à M. le Ministre de l’instruction publique, j’avais cru devoir m’étendre sur la description du territoire de Césarée de Cappadoce, située au pied du mont Argée.

» J’avais été frappé de l’aspect menaçant de cette contrée, et comparant son état actuel avec la relation de Strabon, je croyais devoir ranger ces volcans dans la catégorie des terrains d’épanchement dont les phénomènes ont cessé depuis dix-sept siècles ; car on ne saurait douter que Strabon en ait été témoin. Mais les terribles effets du feu souterrain n’étaient que suspendus. J’apprends à mon retour de Caramanie, qu’il y a un mois, jour pour jour, une grande partie de la ville de Césarée a été détruite, et que vingt villages des environs de cette ville ont horriblement souffert, ou ont été entièrement détruits par un tremblement de terre.

» C’est au pied du mont Argée que les premiers symptômes se manifestèrent. La terre s’ouvrit et il en sortit d’épaisses colonnes de feu et de fumée ; le mouvement d’oscillation a dû se faire sentir de l’est à l’ouest ; car il n’est question que de la destruction des villages situés sur cette ligne. Il faut que le tremblement de terre se soit étendu sur une zone d’au moins cinq milles de largeur pour que la ville ait eu à souffrir, car elle est à cette distance du pied de la montagne. Deux mille maisons, dit-on, ont été renversées ; tous les habitans eussent péri si la ville eût été entourée de murs : ils ont pu fuir dans toutes les directions. Strabon, car de son temps aussi la ville était sans muraille, attribue à la négligence des princes de Cappadoce l’absence de fortifications ; mais la vraie cause n’est-elle pas dans la nature de la contrée ?

» La plaine de Césarée est formée d’un lit de tuf parfaitement horizontal, fendillé en tous sens par des espèces de vallées à parois verticales que j’avais cru formées par le retrait. Plusieurs de ces vallées se sont, dit-on, rouvertes avec fracas en vomissant des flammes ; il ne m’a pas été possible de savoir si des laves se sont épanchées des flancs du mont Argée et s’il a surgi quelqu’un de ces dômes nombreux qui en couvrent la pente.

» Les principaux villages des environs sont situés sur le flanc de collines