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HISTOIRES D’OURS

nous comptions que si l’un de nous deux faisait lever quelque gros gibier, il aurait la chance d’un bon coup de fusil, ou pourrait le faire détaler dans la direction de l’autre.

En arrivant au-dessus de la ligne du bois, nous aperçûmes trois élans, mais ils étaient trop loin et nous décidâmes de ne pas nous en occuper pour le moment. Nous continuâmes à suivre nos directions respectives, tel que convenu, mon compagnon prenant la pente de gauche, et moi faisant le tour par la droite. Le lieut. Waite avait une carabine militaire réglementaire, calibre 45-70, et un revolver de service. Je m’étais armé d’une carabine Winchester Express, calibre 50,et d’un revolver Colt, calibre 45.

Après nous être séparés, nous fîmes sans relâche la chasse, avec l’idée de nous rencontrer deux heures plus tard. Je longeai le bois pendant quelque temps ; je relevai quelques pistes d’ours, mais elles n’étaient pas assez fraîches. Un peu plus tard, j’atteignis le lit d’un petit ruisseau asséché, chose très fréquente à cette saison (septembre) dans le Wyoming. Là, sur le sable sec et la boue, j’aperçus les plus larges pistes d’ours que j’avais jamais vues de ma vie, mais, sur ce sol desséché, je ne pouvais juger si elles étaient récentes. Comme elles se suivaient dans le lit du ruisseau, je résolus de m’engager pendant quelque temps sur ces traces, d’autant plus forcément que les bords du ruisseau étaient escarpés.

Il y avait bien une vingtaine de minutes que je cheminais en scrutant soigneusement chaque côté de l’escarpement, lorsque j’aperçus mon ours.

Je pensai qu’il avait pu m’entendre venir, et qu’il avait lâché le ruisseau pour en escalader le coteau. Quoi qu’il en fût, il n’avait pas l’air pressé de déguerpir. Il était à une trentaine de verges de distance et droit au-dessus de moi. Comme il gra-