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HISTOIRES D’OURS

Une fois chacun bien repu, le bol de graisse fut rapporté devant le chef. Se plongeant les deux mains tout grandes ouvertes dans la graisse, il s’en enduisit sa longue chevelure Tous les convives imitèrent son exemple. Pouvons-nous voir dans ce fait-là l’origine de la graisse d’ours pour les cheveux ?

Voilà comment finit la fête. On apporta des pipes et du tabac en bloquettes (plug), et tous les fumeurs purent se payer une jouissance. Les restes furent vite enlevés par les femmes pour leur repas, et tous les os furent jetés au feu. Aussitôt la nappe disparue, ce fut une sieste sur toute la ligne ; les dineurs allèrent s’étendre ça et là sur l’herbe aux environs.

Si je n’avais pas été déjà au courant de ces sortes de fêtes, je me serais certes attendu d’être invité peu après à quelqu’enterrement, mais tout se passa comme à l’ordinaire

Grâce aux efforts des missionnaires, ces rites et coutumes superstitieuses sont en partie abolis sur la côte, mais ils ressuscitent au moment où les Sauvages s’en vont en excursions de chasse dans l’intérieur.

On célèbre de pareilles fêtes en l’honneur du caribou et du castor, et aussi d’oiseaux comme l’oie sauvage et le huard. Je n’ai jamais entendu parler de fêtes semblables dans cette partie du pays en l’honneur du poisson. À l’intention d’un animal ou d’un oiseau, pour lequel il y a fête, aucune autre variété de viande n’est admise, et les approvisionnements sont toujours accumulés de façon à ce qu’il y en ait plus qu’on en peut consommer. Les Sauvages iront jusqu’à se priver eux-mêmes pendant quelque temps pour rassembler la quantité d’approvisionnement voulue.

Il y a quelques années, je vendais un piège No 5 à ours à un vieil Indien du nom de Ka-mikamust, « celui qui chante ». C’était un piège Newhouse ; il avait un écartement des mâchoires d’environ onze