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Le Pékan. Marte à fanon

(MUSTELLA PENNANTI)



PARMI les animaux à fourrures que nous trappions, comptons celui-ci ou, comme quelques-uns l’appelaient, le pêcheur (Fisher). Pourquoi ? Je ne peux pas me l’imaginer, car je ne l’ai jamais vu happer le poisson, ni ai-je jamais entendu dire qu’il en prend. Je sais, toutefois, qu’il mange du poisson, car nous avons constaté assez souvent qu’il volait le poisson que nous mettions comme appât à nos attrapes à vison et à marte.

Il se nourrit naturellement de viande et, quand il peut en attraper, ce qu’il préfère est surtout la viande de porc-épic dont il est le mortel ennemi. Chose très étrange, c’est que les barbes du porc-épic ne paraissent pas le gêner le moins du monde.

Quelques années après m’être mis à trapper, je pris un gros pékan, un mâle, dont le corps, je peux le jurer, était hérissé de plus de deux cents piquants, et dont il n’avait pas l’air de se sentir incommodé. Le fait me parut si extraordinaire que je l’examinai de très près pour voir si je ne lui découvrirais pas quelque pustule ou enflure ; il n’y en avait pas. L’animal était gras et en excellente condition.

Pas du tout satisfait de ce cas particulier je résolus de poursuivre cet examen sur tous les spécimens qu’il m’arriverait de prendre. À partir de ce moment-là, je frappai et tuai une quarantaine de pékans qui tous, sans en ressentir de conséquences, avaient le corps lardés de piquants. J’ai, en différentes occasions rapporté ces faits-là à quelques-uns de mes amis, mais à tout coup, je croyais apercevoir un sourire qui semblait dire : « Encore une de ces histoires à dormir debout ! » (a fish (er) story).