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Mes débuts comme trappeur



LE premier septembre je retournai à la maison à la Baie de la Trinité, pour mettre la main aux préparatifs obligés de mon expédition d’hiver. Un garçon sans expérience comme je l’étais alors, ne pouvant s’aventurer ainsi seul, j’avais à trouver quelqu’un d’entraîné et qui en même temps serait disposé à me renseigner et à me céder une part raisonnable du butin que nous pourrions faire. Ce professeur et partenaire je le rencontrai dans la personne d’un jeune Indien du nom d’Ashini, le Roc. C’était un garçon de haute stature, mesurant plus de six pieds, superbe marcheur à la raquette et excellent tireur. Il consentit à diviser ses prises avec moi et à faire de son mieux pour m’instruire dans la chasse à la trappe, pourvu que je fisse l’avance de tout l’équipement, s’engageant à me rembourser sa part au printemps, à l’exception toutefois du canot d’écorce que je devais fournir à mes frais. Convaincu que c’était là un bon arrangement, je bâclai le marché.

Nous devions faire ce qu’en langage de trappeur on appelle une chasse d’automne, c’est-à-dire partir en septembre et revenir en novembre, avant les grosses chutes de neige, puis, en décembre, commencer la chasse d’hiver qui se termine à la fantaisie du trappeur ; certains trappeurs en reviennent au mois de juin. Notre équipement n’était pas fort coûteux : farine, lard, soda, sel, thé et sucre, tels en étaient les principaux articles. Aucun de nous deux fumait ou était adonné aux liqueurs alcooliques, de sorte que c’était autant d’économies en fardeau et en dépenses. Tentes et poêles de camp étaient choses inconnues.

Nous emportions avec nous, pour le mauvais temps, une longueur de douze pieds de coton jaune ordinaire