Page:Comeau - La vie et le sport sur la Côte Nord du Bas Saint-Laurent et du Golfe, 1945.djvu/33

Cette page a été validée par deux contributeurs.
29
À MON RETOUR DE L’ÉCOLE

père m’expliqua tout cela. Il me déclara qu’il n’avait pas les moyens de me renvoyer à l’école, que si je me décidais à faire quelque chose, je pourrais rester à la maison, lui aider à la pêche, et, l’hiver, faire la trappe ; sinon, ce que j’aurais de mieux à faire serait de retourner à Québec ou à Trois-Rivières et d’y essayer de trouver un emploi qui me conviendrait.

C’était une grave proposition pour un garçon de treize ans qui ne connaissait que bien peu ou presque rien de l’existence dans les villes, pas plus dans tous les cas que ce que j’en avais pu voir durant mon temps d’école.

Je me décidai à rester et à me faire trappeur, état que j’exerçai ensuite comme professionnel pendant quinze ans. Avant cela, je ne m’étais jamais appliqué à aucun travail, excepté parce que ça m’amusait, ou pour aider parfois à l’entrepôt de Mingan durant les saisons d’affaires ; ce qui était, du reste, très facile ; je n’avais qu’à mesurer du rhum de la Jamaïque, dont on vendait de grosses barriques aux équipages des goélettes, à leur retour de leurs expéditions de chasse aux loups-marins.

Pendant une couple d’années, la Compagnie de la Baie d’Hudson acheta tous ou presque tous les loups-marins capturés par les goélettes de la Pointe-aux-Esquimaux ; ce qui comprenait plusieurs milliers de loups-marins qui valaient alors environ quatre dollars pièce. L’écorchage, le salage des peaux, le dépeçage du gras, l’extraction de l’huile, qui ne se faisaient pas autrement qu’à la main, imposait un rude labeur ; aussi pendant quatre ou cinq semaines, le poste avait-il une allure fort animée.

Je trouvai l’industrie de la pêche au saumon bien dure en comparaison de ce qui se passe aujourd’hui ; j’avais à me lever avec l’aube, à commencer mon travail en visitant et nettoyant les filets ; j’avais à