Page:Comeau - La vie et le sport sur la Côte Nord du Bas Saint-Laurent et du Golfe, 1945.djvu/328

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
324
SERVICE DE LA POSTE

nait pas. Il persista à faire les cent pas de long en large pour se réchauffer ; heureusement pour lui, il ne faisait pas grand froid.

Jusqu’où fut-il ainsi emporté à la dérive, il ne put le dire, mais, d’après ce que je connais de l’endroit, il avait dû aller à deux milles au large.

Avec une marée montante très forte, la glace s’était mise à revenir et avait rejoint la glace ferme et solidement attachée de la grève. Dès que la chose avait été possible, il s’était élancé du côté de terre où les lumières l’avaient guidé.

La leçon, je crois, fut bonne, car ayant eu encore l’occasion de lui servir de guide dans deux voyages subséquents, je ne l’entendis jamais parler du moindre raccourci.

Durant les premiers hivers que nous eûmes un service régulier de trois ou quatre courriers, il y eut des accidents de différente nature, mais il n’y eut pas de pertes de vie. Quelques-uns furent victimes d’engelures, d’autres passèrent à travers la glace et, une fois, dans une tempête de neige, ils perdirent leur chemin et furent onze jours écartés dans les quarante-cinq milles de portage de Manicouagan. Malgré toutes ces situations risquées, il est rarement arrivé que l’on ait perdu des courriers, quoiqu’ils arrivaient souvent plus ou moins avariés à destination.

Une nuit, deux de ces employés faillirent être brûlés tout vifs, pendant leur sommeil, dans l’incendie de leur camp. Ils purent se sauver. Après avoir perdu une partie de leurs vêtements, et la moitié d’un de leurs sacs.

Une autre fois, un éboulis le long de la Manicouagan fit chavirer le canot et précipita à l’eau les quatre hommes qui le montaient. Comme il n’y avait que quatre ou cinq pieds d’eau, ils purent