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SERVICE DE LA POSTE

Le chef du bureau de poste, Monsieur W. S. Church, qui était aussi agent de la Compagnie de la Baie d’Hudson, nous dit que le courrier de retour serait prêt pour dix heures le lendemain matin. Ceci nous mettait trop en retard pour arriver le même jour à Manicouagan ; cependant, je décidai de partir ; nous devions coucher à la Pointe-aux-Outardes. Le Rév. Père Arnaud nous avait incités à loger chez lui à la Mission ; nous y fûmes bien confortablement accommodés. À l’heure dite, nous eûmes le courrier et nous partîmes.

La ligne de la côte contourne ici une grande baie avec la Pointe-aux-Outardes qui se projette du côté est de la rivière : celle-ci a quatre milles de largeur à son embouchure. En ligne droite, il n’y a que douze milles marins, mais, par le détour, on compte seize bons milles. Comme je l’ai déjà dit, la glace était bonne et paraissait l’être aussi loin que l’œil pouvait porter. Lévesque voulait couper au plus court, et proposa la chose à deux ou trois reprises Je lui dis que c’était trop risqué, parce que la glace pouvait se détacher du rivage par quelque forte marée ou par quelque furie de vent, et que, de plus, elle pouvait bien ne pas être solide au loin de la côte, attendu qu’en y allant au plus coupant, nous nous trouverions pendant quelque temps à cinq milles de terre.

Je lui expliquai tout cela, et comme il n’avait rien dit, j’en avais conclu qu’il avait abandonné son idée. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque, quelques instants après, je vis qu’il m’avait laissé et qu’il s’en allait tout droit loin de la rive. Je lui criai, mais rien n’y fit ; ce que voyant, je continuai à suivre notre ancienne piste le long du rivage. J’arrêtai au wigwam du chef Estlo près de la rivière-aux-Outardes. Je dinai chez lui, je lui communiquai les der-