Page:Comeau - La vie et le sport sur la Côte Nord du Bas Saint-Laurent et du Golfe, 1945.djvu/238

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
234
NOTRE VOYAGE DE RETOUR

couru trente-six milles. Nous étions alors dans un pays beaucoup plus habité et les chemins étaient bons. Nous quittions Matane à bonne heure le lendemain et nous arrivions à la station de l’Intercolonial à Petit Métis, vers 4 heures de l’après-midi ; ce fut notre meilleure journée de course ; nous avions fait environ 45 milles.

J’y trouvai plusieurs télégrammes qui m’attendaient et parmi lesquels il y en avait un de feu le Colonel Allan Gilmour, d’Ottawa, me félicitant de notre arrivée sains et saufs sur la côte sud et m’autorisant à tirer sur lui la somme de cent piastres pour nos dépenses jusqu’à Québec, cadeau bien généreux, et, certes, bienvenu dans la circonstance. Un autre message d’un ami personnel de Québec, m’avisait d’attendre jusqu’au lendemain à Métis, attendu qu’il s’occupait de nous obtenir passage gratuit par l’Intercolonial.

Cependant, l’état de mon frère ne me permettait pas de m’attarder en route, et je préférai solder le prix du passage et filer. Ce fut aussi bien, car j’appris plus tard que l’on ne s’était pas rendu à la demande de mon ami de Québec. Nous nous installâmes non loin de la station dans une petite maison de pension tenue par un M. Beaulieu, qui se mit en quatre pour nous accommoder. Un jeune homme que je pris pour un commis-voyageur pensionnait là. Il parut prendre un vif intérêt durant la soirée au récit de notre aventure, et manifesta beaucoup de sympathies pour les souffrances qu’endurait mon frère. Le lendemain matin, au moment où nous étions prêts à partir, il m’accosta et me dit :

Écoutez, mon cher ami, je suis pauvre, et je ne puis disposer que de vingt piastres ; mais si vous en avez besoin, elles sont à vous ; utilisez-les pour vous et vos compagnons.