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À TRAVERS LE SAINT-LAURENT

Au coucher du soleil, nous étions à quatorze milles au sud-est de la Pointe-des-Monts. M. Fafard, gardien du phare, eut la prévoyance d’allumer le phare pour nous, au cas où nous en aurions besoin, pour nous diriger à terre. Pendant quelque temps il nous indiqua notre position, mais, sur les huit heures, nous perdions la lumière de vue.

Le chenal d’eau claire au nord-ouest de nous allait s’élargissant et était assez long pour donner libre jeu à la houle. Nous commençâmes à sentir le roulis jusqu’à ce que sur les 10 heures du soir, la mer devint tellement agitée qu’elle passa par dessus notre bloc de glace. L’espace d’eau libre était maintenant tout près de nous.

Je calculai que nous devions être alors à dix-huit milles de la Pointe-des-Monts. Notre seule sécurité était maintenant de nous enfoncer encore plus loin dans la glace vers la côte sud. Nous appareillâmes les canots et nous filâmes vers le sud. Pendant quelque temps nous recommençâmes la poussée de nos canots. À mesure que nous gagnions le sud, la glace se faisait plus épaisse avec le froid ; elle finit par nous porter et nous y traînâmes les canots.

Une heure plus tard, nous arrivions à une étendue d’eau claire, faisant à peu près sud-ouest par rapport à nous, et longue de près de quatre milles.

Nous jouâmes de l’aviron avec toute la vigueur possible afin de nous réchauffer.

La nappe d’eau finalement se réduisit à rien, et nous eûmes à redescendre sur la glace et à y tirer nos canots. C’était une besogne terriblement dure, et nous avancions bien lentement ; d’aussi près que j’en pouvais juger, nous faisions environ un mille à l’heure.

Les glaces étaient aussi de formation différente ; elles étaient beaucoup plus épaisses ; leurs entrechoquements et craquements étaient quelque chose