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PERDU DANS LA FORÊT

était mon associé pour la trappe. En descendant, William m’avait souvent parlé et posé des questions à propos des Indiens ; je pensais alors que c’était de sa part simple affaire de curiosité, mais, plus tard, je découvris qu’il en avait grande peur. Il avait lu les récits de leur coutume de scalper les gens, de leurs traitements barbares des prisonniers, des tortures infligées aux missionnaires, et il croyait que les Montagnais gardaient encore ces coutumes.

Nous avions au premier étage une chambre que nous lui assignâmes ; elle avait une fenêtre qui faisait face au nord, et, à une centaine de verges franc nord, se dressait un fourré de jeunes épinettes et sapins. Trois ou quatre jours après notre arrivée, ma sœur me dit qu’elle croyait que William ne couchait pas dans son lit, que les couvertures étaient relevées, qu’il y avait dépression dans l’oreiller et le lit, mais que le lit était froid, et enfin qu’elle était certaine qu’il n’avait pas servi. Je me trouvai un peu embarrassé par cette constatation et je me demandai s’il n’était pas déjà retourné à ses anciennes habitudes. Notre plus proche voisin demeurait à un demi-mille. Était-il possible qu’il se rendit là ? Je résolus de le surveiller.

Le même soir, comme à l’ordinaire, vers les neuf heures et demie, je fis comme si j’allais me coucher, vu que nous avions à nous lever de bon matin. William s’en fut à sa chambre et je l’entendis fermer soigneusement sa porte et pousser le verrou. Redescendant doucement l’escalier, je me glissai au dehors et me postai de manière à pouvoir observer la fenêtre de sa chambre. La lumière était déjà éteinte et je restai une couple d’heures au guet, ce fut en vain.

Nous avions convenu d’aller à la pêche le lendemain. À la première apparition de l’aube j’allai le réveiller. Il répondit de suite. J’entendis le bruit