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PERDU DANS LA FORÊT

son père, étaient ses livres favoris. Il avait été aussi mêlé à des bagarres, ce qui avait causé beaucoup de trouble à son père. Il était à l’âge où, comme on dit, l’on jette sa gourme.

Un automne, lors d’une visite chez eux, mon oncle me dit :

— Alexandre, je voudrais bien que tu amènerais William avec toi pour l’hiver, afin de lui apprendre à tirer et à faire la chasse, ou quoi que ce soit, pour l’éloigner d’ici et le guérir, si c’est possible, de ses mauvaises habitudes. Si tu veux faire cela, je te paye toutes ses dépenses et quelque chose par dessus le marché.

Je ne me sentais pas beaucoup pressé d’accepter cette corvée, mais comme je n’usais d’aucune liqueur alcoolique moi-même, que je n’en gardais pas, et que je savais qu’il n’y avait pas moyen ou presque pas moyen de s’en procurer sur la Côte Nord en hiver, j’acceptai la tâche, pourvu cependant que mon oncle pût décider William à partir avec moi, ce dont je doutais beaucoup. Cependant tout se passa parfaitement, grâce surtout à l’influence de la mère, très brave femme, qui vivait dans la crainte perpétuelle que William se trouverait pris un jour, dans quelque mauvaise affaire.

Nous quittions Québec, le 1er septembre, à bord d’une petite goélette de pêche de vingt tonnes, appartenant au capitaine Ferguson, de Sheldrake. La descente fut longue, et il fit gros temps. Pauvre William ! Il eut affreusement le mal de mer, ce qui l’abattit complètement. Il n’avait pas même le courage de se joindre au capitaine, quand celui-ci lui offrait un verre de grog.

Je n’étais pas encore marié à cette époque-là, mais j’avais chez moi une sœur aînée qui tenait la maison, et deux de mes frères dont l’un, Firmin,