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PREMIÈRES ANNÉES

Un autre de nos sports favoris, était de tendre des collets au petit gibier, dresser des pièges et de faire la chasse aux oiseaux, à la flèche.

Cet état de choses dura jusqu’à ce que j’eus atteint l’âge de sept ans, c’est alors que se produisit un gros événement. Comme cadeau d’anniversaire de ma naissance, mon père me donna un fusil, pas un fusil de bois ou de ferblanc, mais un vrai fusil se chargeant à poudre et à plomb.

Si je me trouvai heureux ! Jamais je n’oublierai ce jour-là ! Pas plus d’appétit que ça pour toutes les bonnes choses que ma mère avait préparées… je ne pensais qu’au fusil.

Cette nuit-là, je dormis à peine. Si je m’assoupissais, c’était pour rêver au beau fusil dont une description intéressera peut-être le lecteur.

C’était ce qu’on appelait généralement un fusil de traiteur de la Baie d’Hudson, fusil à pierre, du calibre de 28 pouces, ayant une solide crosse de bon bois franc qui se prolongeait sur toute la longueur du canon. Toutes les pièces d’un tel fusil étaient on ne peut plus solides, et il était bien rare d’en trouver une seule qui fût ou avariée ou ne fonctionnât pas. Ces fusils étaient, règle générale, fabriqués par la maison Parker, Field et Fils, de Sheffield, en Angleterre. Mon fusil était presque neuf ; un sauvage seulement s’en était servi pour la chasse au caribou, et le fusil n’avait éclaté que par suite de l’arrêt d’une balle à la moitié de la longueur du canon. Mon père en avait enlevé le bout à la lime, ne laissant au fusil que quinze pouces de canon. Jusqu’à quinze verges l’arme faisait assez bonne contenance, mais au-delà, la charge invariablement, s’éparpillait. Sa faculté de pénétration était excellente parce que c’était du très gros plomb, du BB et du AAA que l’on employait alors sur la côte ; et encore aujourd’hui, quelques