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TRAGÉDIE SUR LA CÔTE NORD

Après s’être débarrassé du cadavre, le meurtrier mit à la voile pour Pentecôte, à quinze milles à l’ouest, pour attendre là un jour favorable pour retourner chez lui. Aux gens qu’il rencontra, il raconta qu’il avait traversé un trappeur et l’avait laissé pour l’hiver à la Pointe-au-Jambon. Il répéta la même histoire une fois de retour à Sainte-Anne-des-Monts. Ses propres habits et ceux de Ouellet étaient tous couverts de sang. Il les mit tremper dans une cuve et les lava lui-même, en expliquant que ces taches de sang provenaient d’un gros loup-marin que lui et Ouellet avaient tué, et qu’ils avaient taillé en morceaux comme appâts pour les pièges à renards de Ouellet qui lui, avait décidé de passer l’hiver sur la Côte Nord pour trapper.

Vers cette époque-là, la fonderie Molson exécutait des travaux à la rivière Moisie. Comme il n’y avait pas de service régulier de malle dans l’endroit en hiver, la fonderie employait un courrier spécial, un nommé Luc Gagnon.

Au mois de mai après le meurtre de Ouellet, Gagnon, avec un compagnon, s’en revenait chez lui en canot. Il avait fait gros vent toute la journée, et, pour profiter du calme, il avait décidé de voyager la nuit. Vers onze heures du soir, Gagnon proposa à son compagnon de descendre quelque part à terre pour prendre une tasse de thé et se mettre quelque chose sous la dent, ce qui leur permettrait de se reposer un peu et de se réchauffer, car la nuit se faisait froide.

En mettant pied à terre, ils se trouvèrent dans la petite anse où Poitras avait enterré sa victime. Pendant que son compagnon ramassait du bois et faisait les préparatifs du repas, Gagnon était allé dans le bois à la recherche d’écorce de bouleau pour allumer le feu. En tâtonnant d’ici de là dans la noirceur, il lui arriva de mettre le pied sur le corps de