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HISTOIRES D’OURS

dégagé pour permettre aux chevaux d’y passer. À son retour, il attacha les bêtes à une certaine distance, parce que l’odeur de l’ours les aurait fait s’emballer. Ce fut pour nous deux, une tâche bien difficile que de tourner l’animal sur l’autre côté pour finir de lui enlever la peau ; nous estimions son poids à au moins neuf cents livres, mais il en pesait tout probablement davantage. Sur le dos et la croupe, il avait une couche de gras de quatre pouces d’épaisseur. Cette énorme couche de gras et le long pelage de l’animal, voilà ce qui m’avait trompé lors de mon premier coup ; la balle avait labouré le gras et mis à nu l’épine dorsale : le choc avait été suffisant, cependant, pour le faire tomber. Ma deuxième balle l’avait frappé en arrière de l’épaule, lui cassant une côte, et déchirant une partie du poumon ; mais comme, à ce moment-là, il se retournait, la balle avait passé trop loin en arrière du flanc opposé pour léser ses parties vitales.

Quand tout fut prêt, viande et peau, le lieutenant Waite alla chercher mon cheval. Il le tenait par la longe et lui avait jeté sa tunique par-dessus la tête pour l’empêcher de voir la charge qu’on allait lui mettre sur le dos. Le cheval était très agité, se cabrant, bondissant, mais je réussis finalement à accomplir mon travail.

Toutefois, à peine le lieutenant lui eut-il découvert la tête, que le cheval, renâclant bruyamment, s’échappa et se précipita dans la pente du ravin. Heureusement, sa grande longe traînait derrière lui. Sautant sur son cheval, le lieutenant Waite manœuvra de façon à le rejoindre et à faire que son cheval mit la patte sur la longe afin d’arrêter le fuyard.

Après quelques cajoleries, le mustang se tranquillisa, et ne nous causa plus de trouble. Nous arrivâmes au camp sur les cinq heures de l’après-midi.