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postérité un des Sept Sages « qu’il faut observer en tout un milieu et une juste mesure » [m¡tron riston] : ce qui doit s’appliquer non seulement aux autres actions, mais aussi à l’acquisition d’une terre, afin qu’on ne veuille pas faire un achat supérieur à ses moyens pécuniaires. C’est ce point aussi que touche cette belle sentence de notre poète : « Vantez les grands domaines, cultivez-en un petit. » Ce savant homme, comme je le crois, s’est borné à mettre en vers un adage transmis par les anciens. On reconnaît, en effet, que les Carthaginois, nation très ingénieuse, disaient que le champ devait être plus faible que son cultivateur, puisque, dans la lutte qui s’établit entre eux, si le fonds est le plus fort, c’est le maître qui souffrira le dommage ; car il n’est pas douteux qu’un vaste champ mal cultivé produit moins qu’un petit qui l’est bien. Aussi les sept jugères que le tribun Licinius assigna à chaque citoyen, après l’expulsion des rois, rapportaient à nos ancêtres de plus grands produits que ne nous en donnent aujourd’hui les plus vastes guérets. Aussi Curius Dentatus, dont nous avons parlé un peu plus haut, regarda-t-il comme au-dessus de ce que méritait un consul, un triomphateur, les cinquante jugères de terrain que, après une victoire remportée sous son heureux commandement, le peuple lui avait décernés comme récompense de sa valeur signalée : il refusa le présent populaire offert en public, et se contenta de la portion donnée aux plébéiens. Même après que nos victoires et la mort de nos ennemis eurent rendu disponible une immense quantité de terres, il fut défendu comme crime, à un sénateur, de posséder plus de cinquante jugères ; et C. Licinius lui-même fut, en vertu de sa propre loi, condamné pour avoir, dans l’excès de