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« Que veux-tu, toi ? »

CHAPITRE VI

Premier public d’un jeune artiste.

Or, un matin qu’Ambroise Tarnaud s’évertuait de plus belle sur le violon paternel dans sa grotte des bords de l’Yon, il lui sembla tout à coup que le ciel s’obscurcissait. Il leva les yeux, regarda vers l’entrée de la grotte… et le violon faillit lui tomber des mains.

Ce n’était pas un nuage qui avait passé entre le soleil et lui, c’était une ombre, et cette ombre appartenait à un corps, le corps menu d’une fillette d’environ dix ans. Elle était là, debout à l’entrée de la grotte, son tricot à la main comme une vraie fille de la Vendée, et très-pittoresque avec son jupon court, ses pieds nus, son fichu à carreaux rouges croisé sur sa poitrine, et sa coiffe mise sans aucune coquetterie sur ses cheveux ébouriffés qui brillaient au soleil comme s’ils eussent voulu lui faire une auréole. Elle écoutait, bouche béante, le concert qu’Ambroise lui donnait sans le savoir et sans le vouloir. Il le voulait même si peu que, cédant à son premier mouvement, il s’avança furieux vers la petite fille en lui criant :