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le violoneux de la sapinière.

— Alors tu sais lire, maintenant ? lui dit-elle.

— Oh non ! pas encore : il faut d’abord apprendre cette page-là ; tiens, je commence à la savoir. B, a, ba ; b, e, be ; b, i, bi ; b, o, bo ; b, u, bu. »

Et elle continua laborieusement jusqu’au Z. Véronique ne l’interrompit pas cette fois ; elle la fit même recommencer, sous prétexte de voir si c’était la même chose dans un vieux livre ou dans un neuf. Et quand Marie la quitta, Véronique s’en retourna lentement par les champs qu’embrumaient les approches du soir, relisant son b, a, ba, tant qu’elle y vit clair ; et quand elle ne put plus voir les lettres, et que la cloche de l’Angelus envoya à toute la paroisse le bonsoir de la vieille église perchée sur son rocher, Véronique s’agenouilla et remercia Dieu de tout son cœur d’avoir semé les prés des jolies fleurs qui lui avaient valu la conquête du vieil alphabet.