Page:Collins - Le Secret.djvu/375

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle entra dans la chambre, à petit bruit. L’unique fenêtre qui l’éclairât donnait au couchant et du côté de la fenêtre était placé, près du lit, le fauteuil que l’oncle Joseph occupait au moment où elle était partie ; elle y retrouvait assis, à son retour, le gardien fidèle. Au moment où elle ouvrit la porte, elle posa un doigt sur ses lèvres en regardant du côté du lit. Sa main dans la main du vieillard, la pauvre malade était endormie.

Rosamond, en s’approchant sur la pointe des pieds, put constater que les yeux de l’oncle Joseph étaient ternes et fatigués. La gêne de la position qu’il occupait et qui lui rendait impossible le moindre mouvement, sous peine d’éveiller sa nièce, semblait commencer à le fatiguer. Rosamond, ôtant son chapeau et son châle, lui fit signe de se lever pour qu’elle pût prendre sa place.

« Si ! si ! murmura-t-elle, voyant qu’il branlait la tête en signe de refus, laissez-moi prendre ma faction pendant que vous irez dehors goûter un peu la fraîcheur du soir… N’ayez pas peur de la réveiller !… Sa main ne serre pas la vôtre… Elle y est simplement posée… Je vais subtilement glisser la mienne à la place… Vous verrez qu’elle ne s’en apercevra pas. »

Tout en parlant, elle glissait sa main sous celle de sa mère. L’oncle Joseph sourit, se leva de son fauteuil, et lui céda le poste qu’elle ambitionnait.

« Il faut toujours faire ce que vous voulez, disait-il. Ce n’est pas un vieux bonhomme comme moi qui pourrait vous tenir tête.

— Y a-t-il longtemps qu’elle est endormie ? demanda Rosamond.

— Depuis près de deux heures, répondit l’oncle Joseph… Mais ce n’était pas le bon sommeil que je lui voudrais… Celui-ci était agité par des rêves. Elle parlait… elle remuait sans cesse… Il n’y a guère que dix petites minutes qu’elle est tranquille comme vous la voyez.

— Vous laissez arriver trop de lumière, dit tout bas Rosamond tournant la tête du côté de la fenêtre, par laquelle pénétrait à flots la chaude et brillante lumière du ciel enflammé.

— Non !… non !… répliqua-t-il en toute hâte… qu’elle dorme ou veille, il lui faut toujours de la lumière : si je sors pour quelques moments, ainsi que vous le voulez, et si le