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velle, quand revint l’oncle Joseph. Il rapportait un panier de fleurs et un panier de fruits, qu’il déposa triomphalement au pied du lit de sa nièce.

« Je suis allé me chauffer un peu à ce bon soleil, chère enfant, lui dit-il, et j’ai laissé tout le temps nécessaire à votre figure pour qu’elle redevînt heureuse. C’est ainsi que je la voulais voir, à mon retour, et que je veux la voir, désormais, jusqu’à la fin de ma vie… Ah, Sarah !… vous ne le nierez pas… C’est moi qui vous ai trouvé le vrai médecin, ajouta-t-il gaiement, désignant Rosamond du regard… Elle vous a déjà remise en bonne voie… Donnez-lui un peu plus de temps, et ce docteur-là vous tirera de votre lit, les deux joues aussi roses, le cœur aussi léger, la langue aussi alerte que mes joues, mon cœur et ma langue… Regardez-moi un peu ces belles fleurs et ces bons fruits que je vous ai achetés… Voilà de quoi réjouir vos yeux et votre nez aussi… puis, ce qui vaut mieux, votre bouche… C’est aujourd’hui fête en notre logis, et il faut qu’il brille, brille, brille… ah ! mais… comme s’il était doré… Puis votre dîner qui va venir… Je l’ai vu sur le plateau… un amour de poulet, gras comme un chérubin… Et puis vous ferez un bon petit somme, que bercera la Berceuse de notre ami Mozart… et sur lequel je veillerai… jusqu’au moment où il faudra descendre chercher le thé de ma petite nièce, laquelle aura rouvert ses beaux yeux… Ah ! mon enfant, la belle chose que d’être enfin arrivés à ce jour de fête !… »

Les deux mains pleines de fleurs, et jetant à Rosamond un regard brillant, il se détourna du lit pour décorer la chambre à sa guise. Quant à sa nièce, sauf quand elle l’avait remercié de ses présents, elle n’avait pas cessé, tout le temps qu’il parlait, de contempler le visage de sa fille ; elle ne s’en rassasiait point. Et, lorsque le bon vieillard eut fini de bavarder, les premières paroles qu’elle prononça furent pour Rosamond toute seule.

« Pendant que je jouis ici de mon enfant, lui dit-elle, je vous garde impitoyablement loin du vôtre. Et je devrais pourtant être la dernière à vous tenir ainsi séparés trop longtemps. Retournez donc, ma chère, près de votre mari, près de votre fils. Laissez-moi, au milieu de mes douces pensées, rêver au bonheur qui m’attend désormais.

— Pour l’amour de votre mère, faites ce qu’elle vous dit là, reprit l’oncle Joseph, avant que Rosamond eût pu répondre… Le docteur assure qu’il lui faut du repos le jour, comme du