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mine, ou des émotions qu’il lui fait éprouver. Dans l’état de santé où elle est, j’attache un grand prix à débarrasser sa pensée de tout ce qui l’obscurcit ou l’oppresse, mais surtout à dissiper une hallucination aussi grave que celle dont je viens de vous faire connaître la nature. Si vous parvenez à combattre cette chimère, vous lui rendrez le plus signalé service, et seconderez singulièrement les efforts que je fais pour la ramener à la santé. Vous sentez-vous disposée à risquer l’expérience ? »

Rosamond promit, sans hésiter, de se consacrer tout entière à cette mission, ou à toute autre qui aurait pour objet le rétablissement de la chère malade. Le docteur, après l’avoir remerciée, la reconduisit dans le vestibule. L’oncle Joseph descendait l’escalier à ce moment-là même.

« Elle est préparée… et désire ardemment vous voir, murmura-t-il à l’oreille de Rosamond.

— Je suppose que je n’ai pas à vous rappeler de nouveau combien il est important de la maintenir dans le calme le plus complet, dit le docteur qui prenait congé. Je n’exagère rien, je vous assure, en disant que sa vie dépend de ce soin. »

Rosamond le salua en silence, et en silence suivit le vieillard qui, sur l’escalier, lui montrait le chemin.

Au second étage, devant la porte d’une chambre du fond, l’oncle Joseph fit halte.

« Elle est là ! dit-il à voix basse et avec émotion… Je vous laisse entrer seule… Il est mieux que, dans ce premier moment, vous soyez tête à tête… Je m’en vais, dans la rue, humer un peu de ce bon soleil, et penser à vous deux… Je reviendrai bientôt… Entrez !… que la bénédiction et la miséricorde de Dieu soient avec vous !… »

Il porta à ses lèvres la main de la jeune femme, puis redescendit d’un pas léger et muet.

Rosamond resta seule devant la porte. Au moment d’étendre la main pour y frapper, un tremblement passager la parcourut de la tête aux pieds. La même douce voix que jadis elle avait entendue dans sa chambre de malade, à West-Winston, répondit à son discret appel. Ces accents, en arrivant à son oreille, évoquèrent en ses souvenirs l’image de l’enfant qu’elle venait de quitter, et le battement fiévreux de ses veines se calma tout aussitôt. Elle ouvrit la porte et entra.

Ni l’aspect intérieur de la chambre, ni l’échappée de vue qu’on apercevait de la fenêtre, ni la décoration de la pièce, ni les meubles qui lui donnaient sa physionomie, rien enfin de ce