Page:Collins - Le Secret.djvu/30

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Sarah pénétra dans cette pièce et constata que la bougie brûlait, non dans la nursery elle-même, mais dans un cabinet intérieur ordinairement occupé, elle le savait, par la bonne d’enfant et par l’unique rejeton de la maison de Treverton, une petite fille, nommée Rosamond, et qui avait alors près de cinq ans.

« Serait-il là ?… Là, et non ailleurs, dans cette vaste maison ? »

À peine cette pensée lui était-elle venue à l’esprit que Sarah cacha brusquement dans le corsage de sa robe, exactement comme elle l’avait fait auprès du lit de sa maîtresse, la lettre que jusqu’alors elle avait tenue à la main.

Puis, sur la pointe des pieds, elle se glissa vers le cabinet. Pour complaire, sans doute, à quelque caprice de l’enfant, la porte avait été ouverte en ogive, et décorée, au sommet, par une espèce de treillis à jour, peint en vives couleurs, de manière à lui donner l’aspect d’une porte de serre chaude. Deux jolis rideaux de toile perse, pendus à l’intérieur du treillis, formaient la seule barrière entre la chambre occupée pendant le jour et celle où dormait l’enfant. L’un d’eux était relevé. Sarah s’avança vers la baie ainsi formée, après avoir pris la précaution de laisser son flambeau dans le corridor.

Le premier objet qui frappa sa vue dans cette petite chambre à coucher, fut le visage de la bonne, assise et profondément endormie sur un fauteuil près de la croisée. Se risquant, après cette première découverte, à regarder plus hardiment autour de la pièce, elle vit son maître assis à côté du berceau de l’enfant. Il tournait le dos à la porte. La petite Rosamond, réveillée, et debout sur son lit, avait les bras passés autour du cou de son père. Une de ses mains tenait suspendue, par-dessus l’épaule du capitaine, la poupée qu’elle avait couchée à côté d’elle ; l’autre main se jouait doucement dans sa chevelure. L’enfant venait de pleurer amèrement, et, tout à fait épuisée maintenant, gémissait de temps à autre, la tête appuyée sur le sein de son père.

Les yeux de Sarah se remplirent de larmes, tandis qu’elle considérait les petites mains attachées au cou de son maître. Elle demeura auprès du rideau soulevé, ne prenant plus garde au risque qu’elle pouvait courir, d’un moment à l’autre, d’être découverte et questionnée ; elle y demeura jusqu’au moment où elle entendit le capitaine Treverton dire à l’enfant, de sa voix la plus douce :