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rut à l’arme que son sexe, de tout temps, a su rendre victorieuse : la persuasion. Elle s’en servit si à propos et si bien, et trouva si merveilleusement le défaut de la cuirasse, qu’elle obtint, en fin de compte, de son époux qui le lui concédait à regret, une espèce de compromis, en vertu duquel il lui était loisible d’acheter la copie du plan, mais à une condition : c’était de renvoyer le plan à M. Treverton, aussitôt qu’il leur aurait servi dans leur recherche ; on l’informerait, en même temps, des moyens employés pour se le procurer ; et on s’excuserait de cet étrange procédé sur le manque de courtoisie dont lui-même avait fait preuve en refusant un éclaircissement sans importance, que tout autre, à sa place, se fût empressé de procurer. Rosamond fit tous les efforts imaginables pour obtenir le retrait, ou du moins la modification de cette clause restrictive : mais l’orgueil susceptible de son époux ne souffrait pas aisément le contact, même de cette main douce et légère. « J’ai déjà, plus que je ne l’aurais dû, fait violence à mes convictions, disait-il, et certes je n’irai pas plus loin dans cette voie… Si nous devons nous abaisser à négocier avec ce domestique, ne lui laissons pas le droit de nous revendiquer comme ses complices. Écrivez en mon nom, Rosamond, à l’homme d’affaires du docteur Chennery, et dites-lui que nous consentons à acquérir la copie du plan sous la condition que j’ai dite ; condition qui devra naturellement, au préalable, être communiquée, dans les termes les plus nets, au domestique avec lequel nous sommes réduits à traiter.

— Et si ce domestique refuse de risquer la perte de sa place, danger auquel cette condition l’expose bien évidemment ? dit Rosamond qui se plaçait, comme à regret, devant son bureau.

— Ah ! ma chère, ne nous tourmentons pas en supposant quoi que ce puisse être !… Attendons, sachons ce qui arrive, et agissons selon les circonstances ! Quand vous serez prête à écrire, dites-le-moi, et je vous dicterai, pour cette fois, la lettre telle que je la comprends. Je veux bien faire savoir à l’homme d’affaires de notre cher ministre que nous agissons ainsi, d’abord parce que M. Andrew Treverton n’est pas de ces hommes vis-à-vis desquels on se conforme aux règles établies entre gens du monde ; en second lieu, parce que le renseignement qui nous est proposé par son domestique, extrait d’un livre imprimé, ne touche en aucune façon, directe ou indirecte, aux affaires privées de M. Treverton. Maintenant, Rosamond, que vos instances m’ont fait accepter ce compromis