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d’une simple domestique, Rosamond quitta le salon avec mistress Pentreath.

Lorsqu’elle revint, sa figure et ses gestes, ses regards, son langage, étaient redevenus sérieux.

« J’espère, Lenny, avoir tout arrangé pour le mieux, dit-elle. D’après ce que m’apprend mistress Pentreath, la chambre la mieux aérée et la plus vaste est celle où mourut ma pauvre mère ; mais j’ai pensé qu’il valait mieux ne pas s’en servir. Je m’y sentais comme glacée, et, rien qu’à la voir, la tristesse s’emparait déjà de moi. Un peu plus avant, dans le corridor, se trouve une chambre qui était jadis ma nursery. Quand mistress Pentreath m’a conté, d’après la tradition, que je couchais là, je me suis presque figuré que je revoyais la jolie petite porte en arceau qui menait à la seconde chambre, la nursery de nuit, comme nous l’appelions autrefois. Il y a une troisième pièce, à main droite, qui communique avec la nursery de jour. J’ai pensé que, si vous n’y voyez aucune objection, nous pourrions nous établir très-confortablement dans ces trois chambres, où j’ai fait tout de suite dresser des lits et allumer du feu. Elles ne sont ni aussi vastes, ni aussi richement meublées que les chambres d’amis ; mais qu’est-ce que cela nous fait ?… Maintenant, si vous voulez, on changera ces arrangements ; mais, pour ce premier début, la maison a une physionomie si déserte, si peu accueillante ! Et puis mon cœur se réchauffe dans cette ancienne chambrette à moi… et il me semble que nous pourrions en essayer pour commencer ; est-ce votre avis ? »

M. Frankland se trouva naturellement de l’avis de sa femme, et, en général, il ne la contredisait guère dans les arrangements domestiques qu’elle s’entendait si bien à organiser. Pendant qu’il lui notifiait un assentiment dont elle n’avait jamais douté, le thé arriva, et sa seule vue aida Rosamond à retrouver cette gaieté qui l’abandonnait si rarement. Le repas terminé, elle s’employa à tout disposer pour que le baby fût établi, avec tous les soins imaginables, dans la chambre où il allait passer la nuit. C’était la pièce à main droite, communiquant avec la nursery de jour. Quand elle se fut acquittée de ce soin maternel, elle revint dans le salon trouver son mari, et leur entretien tourna bientôt (c’était assez leur ordinaire maintenant, lorsqu’ils se trouvaient tête à tête) sur ces deux sujets, si bien faits pour les intriguer : mistress Jazeph et la chambre aux Myrtes.

« Je voudrais qu’il ne fît pas nuit, dit Rosamond. J’aimerais