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Porthgenna, et bien que la lettre de Rosamond à sa femme de charge eût été précisément écrite en vue de cette probabilité, ni elle ni son mari, néanmoins, n’étaient préparés à voir se réaliser si tôt les soupçons qu’ils avaient conçus à ce sujet. Au surplus, l’étonnement que leur inspira, pris en bloc, le contenu de cette lettre, n’était rien, comparé à celui que leur causèrent, en particulier, les passages relatifs à l’oncle Joseph. Ce nouvel élément, qui venait compliquer le mystère de mistress Jazeph et de la chambre aux Myrtes en introduisant sur la scène un étranger inconnu, et en le rattachant étroitement aux incidents bizarres qui venaient de s’accomplir dans l’enceinte du vieux manoir, les dépistait tous très-complètement. La lettre fut lue et relue, et discutée de fort près, paragraphe après paragraphe. Le docteur l’annota soigneusement, pour tâcher d’extraire les faits précis qu’elle pouvait contenir, de la masse de mots insignifiants dans laquelle M. Munder les avait longuement et savamment noyés. Enfin, après avoir tant pris de peine pour la rendre intelligible, il fallut bien la reconnaître pour le plus mystérieux et le plus inextricable document qu’eût jamais tracé la plume d’un mortel.

Après, que, de désespoir, la lettre eut été abandonnée, la première idée un peu pratique fut suggérée par Rosamond. Elle proposa de partir sur-le-champ pour Porthgenna, elle et son mari, avec le baby, cela va sans le dire, pour soumettre à une enquête minutieuse les incidents relatifs à mistress Jazeph et à l’étranger qui l’avait accompagnée ; on examinerait aussi les passages nord de l’habitation, pour savoir s’il n’y aurait pas moyen d’arriver à quelques conjectures un peu fondées sur l’emplacement de la chambre aux Myrtes, pendant que tous ces incidents, encore de fraîche date, étaient présents à la mémoire des témoins qu’on allait interroger. Le plan ainsi exposé rencontra, de la part de M. Orridge, des objections médicales : mistress Frankland s’était enrhumée, à sa première sortie, en s’exposant à l’air sans assez de précautions ; et le docteur lui refusa l’autorisation de voyager avant huit jours au moins, si tant est que huit jours dussent suffire à son rétablissement.

M. Frankland mit ensuite en avant ses propres idées. Il se déclarait parfaitement convaincu qu’on ne pénétrerait jamais le mystère de la chambre aux Myrtes, si on ne trouvait pas un moyen quelconque d’entrer en communication avec mistress Jazeph. D’autre chose, à son avis, il ne fallait pas se