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— Pas encore… Pas tout à fait encore… Un moment de patience.

— Aidez-moi !… oh !… aidez-moi !… Il faut que je me dérobe à la vue de ces portes !… Que je puisse seulement descendre au bas de cet escalier, et vous verrez que j’irai bien mieux.

— Allons donc… mais doucement, dit l’oncle Joseph, l’aidant à se mettre debout. Attendez un peu… Essayez vos pieds par terre !… Appuyez-vous sur moi… Appuyez, appuyez ferme !… Je ne suis qu’un homme et ne pèse pas gros, mais je suis solide comme un rocher… Êtes-vous entrée dans la chambre ? ajouta-t-il tout bas… Avez-vous la lettre ? »

Il n’obtint pour réponse qu’un soupir amer, et Sarah, par un mouvement de désespoir accablé, laissa aller sa tête sur son épaule.

« Oh ! Sarah !… Sarah !… s’écria le vieillard… Vous avez eu tout ce temps devant vous, et vous n’avez pu pénétrer dans cette chambre ? »

Elle releva la tête aussi soudainement qu’elle l’avait baissée, frissonna légèrement, et faiblement voulut l’attirer du côté des degrés. « Je ne reverrai plus jamais la chambre aux Myrtes… Jamais, jamais, jamais plus ! disait-elle… Allons-nous-en !… Je puis marcher… me revoilà forte… Oncle Joseph, si vraiment vous avez quelque affection pour moi, tirez-moi de cette maison !… Où vous voudrez, pourvu que nous revoyions la lumière du jour et que nous nous retrouvions en plein air… Où vous voudrez, pourvu que Porthgenna-Tower ne soit plus devant nos yeux. »

Les sourcils relevés par la surprise que lui causait cette adjuration, mais s’abstenant sagement de toute autre question, l’oncle Joseph aidait sa nièce à descendre l’escalier. Elle était encore si faible, qu’arrivée au bas, elle dut s’arrêter pour reprendre son assiette. Ce qu’ayant vu, et sentant d’ailleurs, tandis qu’il l’aidait à traverser le vestibule, qu’elle pesait à chaque pas un peu plus sur le bras qu’il lui avait offert, le vieillard, parvenu à portée de voix, se hâta de demander à mistress Pentreath si elle n’aurait pas quelques gouttes d’un cordial quelconque qu’il pût administrer à sa nièce. La réponse affirmative de mistress Pentreath, bien qu’elle n’eût rien de très-gracieux, fut accompagnée d’une promptitude d’action qui attestait combien lui était agréable un prétexte quelconque qui lui permît de retourner dans la partie habitée du vieux manoir. Tout en balbutiant quelques mots sur la nécessité de