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réfléchir ?… À merveille… J’ai donc fumé trois pipes, et il m’est venu trois idées. Ma première idée fut : « Attendons ! » Ma seconde idée fut aussi qu’il fallait attendre. Ma troisième idée, bien définitivement, est qu’il ne faut rien précipiter. Vous avez dit, Sarah, que je vous tranquilliserais en vous faisant connaître le résultat de mes réflexions… Eh bien, vous l’avez… Voilà le résultat… Vous êtes tranquillisée ?… Tout va bien.

— Attendre ? répéta Sarah, dont l’air complètement abasourdi n’annonçait pas précisément un calme parfait… Je crains bien, cher oncle, de n’avoir pas compris. Attendre, quoi ?… attendre, jusques à quand ?

— Attendre, bien sûr, que nous soyons arrivés au vieux manoir… Attendre que nous ayons la porte en face de nous… Il sera temps, alors, de songer à nous la faire ouvrir, dit l’oncle Joseph avec l’accent de la plus profonde conviction… Vous comprenez, maintenant ?

— Oui… c’est-à-dire je comprends un peu mieux qu’auparavant… mais il reste encore une difficulté… Je vais vous dire, mon oncle, plus que je n’ai jamais projeté de dire à personne… Je vous dirai donc que la lettre est sous clef…

— Sous clef dans une chambre ?…

— Pire que cela…, sous clef dans un meuble à l’intérieur de la chambre… La clef qui ouvre la porte de cette chambre, même si je l’avais… cette clef n’est pas tout ce qu’il me faut… Il y a une autre clef… une toute petite clef… »

Ici elle s’arrêta avec un regard tout effaré.

« Une petite clef que vous avez perdue ? demanda l’oncle Joseph.

— Non ; je l’ai jetée dans le puits du village, le matin où je m’échappai de Porthgenna… Oh ! si seulement je l’avais conservée !… Si j’avais pu penser que je pourrais un jour en avoir besoin…

— À ceci, pour le moment, je ne vois pas grand remède… Dites-moi, Sarah : de quelle espèce est ce meuble dans lequel la lettre est renfermée ?

— J’ai peur que les murailles mêmes ne m’entendent.

— Quelle plaisanterie !… Voyons… dites-le-moi tout bas. »

Sarah jeta autour d’elle un regard méfiant, et, se penchant à l’oreille du vieillard, y laissa tomber quelques mots. Il l’écoutait avec une avide attention, et se prit à rire quand elle eut fini.

« Bah ! s’écria-t-il. Si c’est là tout, ayez bon courage…