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— Oui ; mais je ne parle que du train de onze heures, reprit M. Orridge. Tâchez de vous rappeler.

— Me rappeler ?… Attendez !… Je me rappelle, en effet… Je sais qui vous voulez dire. Une dame qui paraissait un peu agitée… elle m’a posé une question peu ordinaire à cette station… Elle tenait son voile baissé, je m’en souviens, et elle est arrivée ici pour le train de onze heures… C’est Crouch, le voiturier, qui a déposé sa malle dans le bureau.

— C’est bien elle. Pour où a-t-elle pris son billet ?

— Pour Exeter.

— Vous disiez qu’elle vous a questionné.

— Oui : elle m’a demandé quelles correspondances on trouvait à Exeter quand on voulait se rendre en Cornouailles… Je lui ai dit que nous n’avions pas ici un tableau exact des heures de départ, et je l’ai renvoyée, pour avoir des renseignements, aux gens du Devonshire, quand elle serait en voie d’arriver. Elle m’a semblé bien timide, bien embarrassée pour une femme qui se résigne à voyager seule… Est-ce qu’on l’a soupçonnée de quelque méfait, monsieur ?

— Oh ! pas le moins du monde, » dit M. Orridge, quittant le chef de gare et se hâtant de remonter en tilbury.

Lorsqu’il fit halte, quelques moments plus tard, devant l’hôtel de la Tête de Tigre, et sauta lestement à terre, en homme bien certain d’avoir fait tout ce qu’on devait attendre de lui, il ne lui en coûtait plus d’aborder mistress Frankland avec la fâcheuse nouvelle du départ de mistress Jazeph, maintenant qu’il pouvait y ajouter, à titre de renseignement supplémentaire, qu’elle était partie pour le Cornouailles.