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plus forte qu’elle n’en a l’air, et je pense très-sérieusement que vous rendrez un vrai service à mistress Frankland en essayant, ne fût-ce que pour un ou deux jours, cette garde qui nous tombe des nues. C’est la créature la plus douce et la plus affectueuse que j’aie jamais rencontrée, et elle pousse jusqu’à l’excès la conscience de tout ce qu’elle s’impose comme devoir. Ne vous faites pas scrupule de me l’enlever. J’ai donné un grand dîner la semaine dernière, et en voilà pour longtemps. Jamais je ne me suis trouvée mieux à même de me passer de ma femme de charge.

— Je me regarde comme parfaitement autorisé à vous offrir, en même temps que les miens, les remercîments de mistress Frankland, dit M. Orridge. Après tout ce que je viens d’entendre, je serais et bien disgracieux et bien ingrat si je ne me conformais à vos bons avis. M’excuserez-vous, cependant, de hasarder une question encore ? Avez-vous jamais ouï dire que mistress Jazeph fût sujette à quelques crises ?…

— Jamais.

— Pas même, çà et là, quelques vapeurs nerveuses ?

— Jamais, depuis qu’elle est chez moi.

— Vous m’étonnez. Il y a, dans son air et ses manières, quelque chose…

— Oui, c’est vrai. C’est une remarque que l’on fait volontiers quand on la voit pour la première fois. Mais ceci tient tout simplement à ce que, douée d’un tempérament assez délicat, elle n’a pas, je le soupçonne, mené une jeunesse très-heureuse. La dame qui me l’a donnée, en me la recommandant très-expressément, m’a dit que, restée sans protection dans des circonstances assez difficiles, elle avait été conduite à faire un mauvais mariage. Elle-même ne parle jamais de ses misères conjugales ; mais je crois que son mari la maltraitait : au surplus, il me semble que tout ceci ne nous regarde pas. J’ai simplement à vous répéter qu’elle m’a été, depuis cinq ans, une aide excellente, et que, nonobstant son chétif aspect, je la regarde comme la meilleure garde que puisse, pour le moment, se procurer mistress Frankland. Inutile, ce me semble, de rien ajouter. Prenez maintenant mistress Jazeph, ou appelez une étrangère par le télégraphe. C’est à vous de décider, naturellement. »

M. Orridge crut deviner une légère nuance d’irritation dans ces derniers mots de mistress Norbury. C’était un homme avisé ; il supprima donc tous les doutes qu’il avait pu conce-