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Pourtant, à peine le bâton fut-il entré de quelques pouces, que je me sentis délivré de ma frayeur superstitieuse et que je fus tout entier au succès de mon entreprise. Sondant en aveugle, dès ma première tentative je tombai juste ! la canne frappa la chaîne.

De la main gauche, je saisis fortement une poignée d’herbes marines, je me couchai sur le bord des rochers et tâtai tout le long avec ma main droite, qui rencontra la chaîne.

Je la tirai sans difficulté, et je vis apparaître au bout la boîte de fer blanc laqué. L’action de l’eau avait tellement rouillé la chaîne, qu’il me fut impossible de la détacher du crochet qui retenait la boîte ; je plaçai celle-ci entre mes genoux, et au prix des plus grands efforts je parvins à enlever le couvercle ; l’intérieur était rempli d’une matière blanchâtre que je reconnus pour être du linge dès que je l’eus touchée.

En vidant la boîte, j’y trouvai aussi une lettre chiffonnée ; je vis qu’elle portait mon nom, je la mis dans ma poche, et j’achevai d’enlever le linge ; il en sortit un gros paquet, qui avait naturellement pris la forme de son contenant, mais que l’humidité n’avait nullement détérioré.

Je portai le linge, sur le sable sec, et là je le déroulai et l’étendis ; on ne pouvait se méprendre sur cet objet de toilette ; c’était une robe de nuit.

La partie du dessus ne présentait que d’innombrables plis et replis ; mais en retournant l’objet, qu’y vis-je ? La tache de peinture provenant de la porte du boudoir de Rachel !

Mes yeux restèrent fixés sur cette tache, et la mémoire me ramena violemment en arrière. Les mots du sergent Cuff me revinrent à l’esprit comme si cet homme eût été de nouveau près de moi ; il me sembla l’entendre indiquer la conclusion irréfutable qu’il fallait tirer de la tache faite sur la porte :

« Découvrir s’il y a dans la maison un vêtement qui porte une tache de peinture. S’assurer à qui il appartient. Savoir comment le possesseur de cet objet peut expliquer qu’il était dans la chambre et qu’il a frôlé la peinture entre minuit et trois heures du matin. Si ses explications ne sont pas satisfaisantes, vous n’aurez pas loin à chercher pour trouver celui qui a volé le diamant ! »