Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 2.djvu/85

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Betteredge, seriez-vous aise d’apprendre que Rachel et moi sommes redevenus bons amis comme auparavant ?

— J’aurais bien mal servi votre famille, monsieur, si vous pouviez en douter !

— Vous souvient-il de la façon dont Rachel m’a traité avant mon départ d’Angleterre ?

— Aussi bien que si c’était hier ! Milady vous écrivit même à ce sujet une lettre que vous eûtes la bonté de me communiquer. Elle vous disait que miss Rachel vous en voulait mortellement pour la part que vous aviez prise à la recherche de son bijou ; mais, ni vous, ni milady, ni personne, ne pûtes deviner le pourquoi.

— Parfaitement exact, Betteredge ! et je suis revenu de mes voyages pour la trouver toujours aussi offensée. Je savais que le diamant en était la cause il y a un an, et je constate que le diamant est encore au fond de sa rancune aujourd’hui. J’ai tenté de lui parler, elle refuse de me voir ; je lui ai écrit, elle ne me répond pas. Comment, au nom du ciel ! puis-je éclaircir ce singulier mystère ? Rachel ne m’a laissé d’autre ressource que de recommencer l’enquête de la Pierre de Lune. »

Il parut envisager la question sous le point de vue que je lui présentais, et ses premiers mots me prouvèrent que je l’avais ébranlé.

« Vous ne lui en voulez pas de votre côté, n’est-ce pas, monsieur Franklin ?

— J’éprouvais de la colère, répondis-je, lorsque je quittai Londres ; mais elle s’est calmée, et maintenant je ne désire plus que rétablir la bonne intelligence entre Rachel et moi ; je ne demande que cela.

— À supposer que vous réussissiez dans vos recherches, monsieur, vous ne craignez point de faire quelque découverte pénible au sujet de miss Rachel ? »

Je compris qu’un attachement jaloux pour sa jeune maîtresse lui dictait cette question.

« Je me sens aussi sûr d’elle que vous l’êtes, répondis-je ; la révélation de son secret ne pourra altérer l’estime dans laquelle nous la tenons. »

Les derniers scrupules de Betteredge s’évanouirent enfin.

« Si je fais mal en vous venant en aide, monsieur Fran-