Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 2.djvu/270

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quelques gentlemen parmi nos passagers firent descendre les chaloupes et s’amusèrent soit à ramer, soit à nager, lorsque la fraîcheur des soirées leur permit ce délassement. Les bateaux eussent dû ensuite être amarrés solidement à leurs places accoutumées ; au lieu de cela, on se borna à les suspendre le long des flancs du navire. Énervés par la chaleur et par l’ennui de se voir ainsi arrêtés, les officiers et les hommes d’équipage prenaient leur besogne peu à cœur.

Pendant la troisième nuit les hommes de veille ne virent ni n’entendirent rien d’insolite ; mais lorsque le jour parut, on constata l’absence de la plus petite des chaloupes, puis on découvrit aussi l’absence des trois Hindous.

Ces hommes avaient, selon toute apparence, volé le bateau pendant l’obscurité de la nuit ; nous étions si près de terre qu’il devenait parfaitement inutile d’envoyer à leur poursuite ; car j’étais certain que, même en faisant la part de la fatigue et de l’inexpérience des rameurs, ils avaient dû aborder dès le point du jour.

Arrivé à Bombay, j’y appris pour la première fois la cause de l’empressement de mes passagers à saisir la première occasion de quitter le vaisseau. Je ne pus que présenter aux autorités le même exposé des faits que je donne ici. Les magistrats me blâmèrent d’avoir permis ce relâchement dans la discipline du navire, et je leur en offris mes excuses ainsi qu’aux possesseurs du bâtiment. Depuis lors, je n’ai eu aucune nouvelle des trois Hindous, et il ne me reste rien à ajouter ici.


III

EXTRAIT D’UNE LETTRE DE M. MURTHWAITE ADRESSÉE À M. BRUFF (1850).


Avez-vous conservé quelque souvenir, mon cher monsieur, d’une sorte de sauvage, avec qui vous eûtes occasion de dîner en ville, à Londres, pendant l’automne de 1848 ? Permettez-moi en ce cas de vous rappeler que cet individu se nommait Murthwaite, et que vous et lui eûtes une