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— Alors, vous saurez que le cab alla de Lombard-Street au quai de déchargement de la Tour. Le marin à la barbe noire descendit, et s’adressa au munitionnaire du bateau à vapeur pour Rotterdam, qui devait partir le lendemain matin. Il demanda s’il pouvait prendre possession immédiate de sa cabine et y coucher le soir même. L’homme répondit que non. Les cabines, les couchettes devaient toutes être nettoyées ce soir-là, et aucun passager ne pourrait s’installer avant le lendemain. Le marin quitta le bateau et se dirigea vers le quai. Lorsqu’il se trouva dans la rue, le jeune garçon remarqua un homme vêtu comme un ouvrier aisé, qui marchait de l’autre côté du chemin, et ne perdait pas le marin de vue. Ce dernier s’arrêta devant un restaurant du voisinage et y entra ; Groseille, ne comprenant rien encore à toutes ces allures, se mêla à un groupe d’autres garçons de son âge, qui regardaient les bonnes choses exposées à la vitrine du restaurant. Il remarqua que l’artisan attendait aussi, mais toujours de l’autre côté de la rue ; au bout d’une minute, un cab s’approcha lentement et s’arrêta près de cet individu. L’enfant ne put distinguer nettement à l’intérieur du cab qu’une personne qui se pencha à la portière pour parler à l’ouvrier. Sans que je le lui aie fait dire, monsieur Blake, il m’a dépeint ce personnage comme ayant le teint basané d’un Indien. »

Il devenait clair encore une fois que M. Bruff et moi avions commis erreur sur erreur ; le marin à la barbe noire n’était évidemment pas un espion aux gages de la conspiration indienne ; serait-ce là, par impossible, l’homme qui s’était emparé du diamant ?

« Peu après, reprit le sergent, le cab redescendit la rue. L’ouvrier traversa et entra dans le restaurant. Le garçon attendit jusqu’à ce qu’il se sentît fatigué et affamé, puis il entra à son tour. Il avait un shilling dans sa poche, et dîna somptueusement d’un pâté d’anguilles et d’un plum-pudding, le tout arrosé d’une bouteille de ginger-beer. Y a-t-il quelque chose qu’un gamin ne puisse pas digérer ? La solution de ce problème reste encore à trouver.

— Enfin, que vit-il dans le restaurant ? dis-je.

— Eh bien, monsieur Blake, il vit le marin qui lisait un journal à sa table, et l’ouvrier qui en faisait autant à la