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mais cela ne change rien au fait, et je conviens que j’ai agi en aveugle. Ce n’est pas la première erreur, monsieur Blake, que j’aie commise dans le cours de ma carrière. Les officiers de police infaillibles n’existent que dans les livres.

— Vous êtes revenu juste au bon moment pour rattraper votre réputation, dis-je.

— Je vous demande pardon, monsieur Blake, repartit le sergent ; maintenant que je me suis retiré des affaires, je me soucie de ma réputation comme d’un fétu de paille ; j’en ai fini avec ces vanités, Dieu soit loué. Je suis ici, monsieur, parce que je garde un souvenir reconnaissant de la générosité de lady Verinder : cette considération seule me fera reprendre mon ancienne besogne, si vous avez besoin de moi pour le moment ; mais c’est affaire d’honneur, et il sera entendu que je n’accepterai pas un sou d’argent. Maintenant, monsieur Blake, dites-moi où en est la situation depuis que vous m’avez écrit. »

Je lui racontai l’expérience de l’opium et les incidents survenus à la banque de Lombard-Street. Il fut très-frappé de l’épreuve tentée sur moi, épreuve dont l’étrangeté était toute nouvelle pour lui ; ce qui l’intéressa beaucoup aussi, ce fut l’hypothèse d’Ezra Jennings relativement à ce que j’avais dû faire du diamant, après avoir quitté le petit salon le soir du jour de naissance.

« Je ne crois pas, comme M. Jennings, que vous ayez caché la Pierre de Lune, dit le sergent ; mais je pense avec lui que vous avez dû certainement la reporter dans votre propre chambre.

— Eh bien ? demandai-je ; qu’en ai-je fait après ?

— N’avez-vous aucun soupçon de ce qui a pu se passer, monsieur ?

— Aucun, quel qu’il soit.

— M. Bruff n’a-t-il aucune donnée ?

— Pas plus que moi. »

Le sergent se leva, alla vers mon bureau, et en revint avec une enveloppe cachetée. Elle portait mon adresse ainsi que le mot « privé », le nom du sergent était écrit dans le coin.

« J’ai suspecté à faux l’année passée, dit-il, et je puis me tromper cette fois encore. Attendez, monsieur Blake, pour ouvrir l’enveloppe, que la vérité soit connue ; alors, com-