lequel je désirais ardemment le consulter. Le sentiment qui m’attirait vers cet étrange personnage m’avait porté à lui fournir l’occasion de ce tête-à-tête ; je me réservais de m’ouvrir ensuite à lui, s’il m’offrait des garanties suffisantes de délicatesse et de discrétion.
Le peu que j’avais entendu me prouvait du moins que j’avais affaire à un gentleman ; il possédait dans sa personne ce que j’oserais nommer le calme inné, qui est un signe de bonne éducation, non-seulement en Angleterre, mais dans tous les pays où on le rencontre. Quel que fût le but de la question qu’il m’adressait, je crus pouvoir y répondre en toute confiance.
« Je présume, en effet, qu’il est d’un grand intérêt pour moi de ressaisir le fil des souvenirs de M. Candy, répondis-je ; oserai-je vous demander si vous pourriez m’indiquer un moyen de venir en aide à sa mémoire ? »
Ezra Jennings me regarda, et un éclair brilla soudain dans ses yeux doux et profonds.
« La mémoire ne saurait être rendue à M. Candy, me dit-il ; j’en parle malheureusement en connaissance de cause pour avoir plusieurs fois tenté l’entreprise depuis son rétablissement. »
J’éprouvai un vif désappointement et ne le lui cachai point.
« J’avoue que j’espérais une réponse moins décourageante, » lui dis-je.
Ezra Jennings sourit :
« Ce n’est peut-être pas là une réponse définitive, monsieur Blake ; il existe, je crois, un moyen de rassembler les souvenirs de M. Candy sans faire un appel direct à sa mémoire.
— En vérité ? Est-ce alors une indiscrétion de ma part de vous demander comment ?
— Nullement. La seule difficulté pour répondre à votre question est celle de pouvoir m’expliquer. Aurez-vous la patience de m’entendre, si je reviens encore sur la maladie de M. Candy, et si j’en parle sans vous épargner les détails techniques ?
— Continuez, je vous en prie ! Vous excitez d’avance ma curiosité. »
Mon ardeur parut l’amuser, ou plutôt je puis dire qu’elle