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« À défaut d’autre moyen, j’aurais moi-même engagé le diamant. C’est en ces termes que je vous écrivis. Attendez ! je fis mieux que cela. Je convins avec Pénélope qu’elle vous remettrait cette lettre quand vous seriez tout seul. Je me proposais de m’enfermer dans ma chambre, de laisser le boudoir ouvert et à votre disposition pendant toute la matinée ; j’espérais, je croyais même avec toute la ferveur de mon âme, que vous saisiriez l’occasion et que vous replaceriez secrètement le diamant dans mon tiroir. »

Ici j’essayai de l’interrompre ; elle leva impatiemment la main, et m’arrêta ; à travers les rapides fluctuations de son caractère, la colère semblait la reprendre. Elle se leva de sa chaise et s’approcha de moi.

« Je sais ce que vous allez me dire, poursuivit-elle ; vous allez me rappeler de nouveau que vous ne reçûtes aucune lettre de moi ; en effet, je déchirai ce que j’avais écrit.

— Et pour quelle raison ?

— Pour la meilleure de toutes. Je préférai détruire ma lettre plutôt que de la perdre pour un homme tel que vous ! Quelles furent donc les premières nouvelles qui me parvinrent dans la matinée ? À peine mon petit plan était-il achevé que je sus que vous, oui, vous !  !!! mettiez plus d’empressement que tout autre à envoyer chercher la police ! Vous aviez pris l’initiative, vous déployiez toute l’activité imaginable dans les recherches ! vous poussiez même l’audace jusqu’à me parler de la perte de ma Pierre ! de cette Pierre volée par vous-même ! de cette Pierre qui, pendant tout ce temps-là, était entre vos mains ! Après une pareille preuve de votre infernale astuce, il ne me restait qu’à déchirer ma lettre. Dire que même alors, lorsque l’interrogatoire de l’officier de police me rendait folle, mon cœur conservait encore assez de faiblesse pour ne pas vouloir vous abandonner entièrement. Je me disais : « Il a joué son odieuse comédie devant toutes les personnes de la maison ; je verrai s’il ose la soutenir en face de moi. J’appris que vous étiez sur la terrasse ; je m’y rendis, et me contraignis à vous regarder, à vous parler. Avez-vous oublié ce que je vous dis ? »

J’aurais pu répondre que chacune de ses paroles m’était présente. Mais à quoi bon en ce moment ?

Comment pouvais-je lui dire que son apostrophe m’avait