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mique, et il n’en fut employé aucune. Notre intéressante Marian était plongée dans le profond repos qui, d’ordinaire, accompagne la convalescence. Nous avions d’avance, sur toute notre route, placé des flambeaux et ouvert les portes. À raison de ma grande vigueur personnelle, je soutenais la tête du cadre ; — ma femme et madame Rubelle en avaient pris les pieds. Je portais ma part de cet inestimable fardeau avec une tendresse virile, un souci tout paternel. Où donc est le moderne Rembrandt qui saurait peindre cette procession de minuit ? Par malheur pour les arts, par malheur pour ce sujet qui offre tant de ressources, il n’existe nulle part un Rembrandt moderne.

Dans la matinée suivante, nous partîmes pour Londres, ma femme et moi, laissant Marian bien enfermée dans ce pavillon central que personne n’habitait plus depuis longtemps, aux soins de madame Rubelle, qui consentit obligeamment à se laisser enfermer ainsi pendant deux ou trois jours. Avant de monter en voiture, je remis à Percival le billet par lequel M. Fairlie appelait sa nièce, et lui prescrivait de passer la nuit chez sa tante en venant le trouver dans le Cumberland ; j’y joignis mes instructions pour qu’il montrât ce billet à lady Glyde quand le moment serait venu. J’obtins aussi de lui l’adresse de l’asile dans lequel Anne Catherick avait été enfermée, et une lettre pour le directeur, annonçant à ce gentleman le retour prochain de sa malade fugitive.

Pendant ma dernière visite à la capitale, j’avais pris mes dispositions pour que notre modeste ménage fût tout prêt à nous recevoir, lorsque nous arriverions à Londres par le train du matin. Cette sage précaution nous mit à même de jouer, dès ce jour-là même, le troisième coup de notre partie, — en recouvrant possession d’Anne Catherick.

Les dates, ici, sont fort importantes. Or, je combine en moi les facultés ordinairement opposées de l’homme sensible et de l’homme d’affaires. Je sais toutes mes dates sur le bout du doigt.

Le mercredi 24 juillet 1850, j’envoyai ma femme, dans