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soupir, le soupir d’un prisonnier qu’on délivre. Me trouver enfin hors de la chambre de M. Fairlie, c’était revenir à la surface de l’eau, après plusieurs minutes de submersion.

Dès que je fus confortablement établi, pour le reste de la matinée, dans mon joli petit atelier, la première résolution à laquelle je m’arrêtai fut de ne jamais plus diriger mes pas du côté des appartements habités par le maître de la maison, si ce n’est dans le cas, fort improbable, où il m’inviterait expressément à lui rendre une seconde visite. Ce point réglé avec moi-même, à ma satisfaction profonde, je recouvrai la sérénité d’humeur que la hautaine familiarité, l’impudente politesse de mon patron m’avaient un moment enlevée. Les heures suivantes s’écoulèrent agréablement à examiner les dessins, à les assortir, à régulariser leurs tranches fatiguées, bref, à tous les menus travaux indispensables pour les mettre en état d’être montés de nouveau. Peut-être aurais-je dû faire plus ; mais, à mesure qu’approchait l’heure du « luncheon », je me sentais inquiet, agité, et hors d’état de fixer mon attention.

À deux heures, je redescendis, légèrement anxieux, dans la salle à manger. Il était assez intéressant, et à plus d’un titre, de savoir ce qui m’y attendait. J’allais, en premier lieu, être présenté à miss Fairlie ; puis, si les recherches de miss Halcombe dans les lettres de sa mère avaient produit le résultat qu’elle en espérait, j’allais voir s’éclaircir le mystère de la Femme en blanc.


VIII


Au moment où j’entrais, miss Halcombe et une dame âgée étaient assises à la table du « lunch ».

Cette dame, qu’on me nomma en me présentant à elle, se trouva être l’ancienne institutrice de miss Fairlie, — Mistress Vesey, — la même que ma vive compagne du