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pas de la naissance de votre fille ; ce mystère n’est pas mort avec elle…

Reculant d’un pas, et me montrant la porte d’un air sévère : — Sortez ! me dit-elle simplement.

— Ni dans votre cœur ni dans le sien, poursuivis-je, bien convaincu qu’il fallait l’acculer à ses dernières défenses, il n’y a jamais eu, pour cette enfant, une seule pensée. Il n’y avait entre lui et vous aucun lien de coupable amour, alors que vous lui donniez ces rendez-vous fugitifs ; alors que votre mari vous surprenait, causant à voix basse, derrière la sacristie de l’église…

Sa main, encore étendue, retomba immédiatement le long de son corps, et tandis que je parlais, les rougeurs irritées de son visage s’étaient peu à peu effacées. Je vis un changement s’opérer en elle ; je vis cette femme, si maîtresse d’elle-même, si impénétrable, si affermie, si intrépide, plier sous une terreur à laquelle toute sa résolution ne pouvait résister, — quand je prononçai ces cinq derniers mots : « la sacristie de l’église ».

Pendant une minute, et même davantage, nous en demeurâmes là, nous regardant l’un l’autre en silence. Je rouvris la bouche le premier.

— Refusez-vous toujours de vous fier à moi ? lui demandai-je.

Elle ne pouvait pas rappeler à ses joues le sang qui les avait abandonnées, — mais elle avait raffermi sa voix, elle avait repris son attitude de sang-froid méfiant, lorsqu’elle répondit à cette question.

— Je refuse, dit-elle.

— M’ordonnez-vous toujours de sortir ?

— Oui. Partez ! et ne revenez jamais !…

J’allai jusqu’à la porte ; j’attendis un moment avant de l’ouvrir, et me retournant pour la regarder encore :

— J’aurai peut-être, lui dis-je, à vous apporter, de sir Percival, certaines nouvelles sur lesquelles vous ne comptez guère, et, dans ce cas-là, je me permettrai de revenir.

— Il n’y a pas de nouvelles de sir Percival qui puissent me surprendre ou m’intéresser, excepté peut-être…