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en décrivant l’état particulier de son esprit, et en tirant de là une conclusion métaphysique plus ou moins subtile. Je ne dis point que cette conclusion soit erronée ; je dis simplement que le jury aimera mieux s’en tenir à ce fait, qu’elle s’est contredite, plutôt que d’entrer dans aucun des arguments par lesquels vous essayerez d’expliquer cette contradiction.

— Mais n’est-il pas possible, repris-je avec insistance, qu’à force de patience et de zèle, on se procure un supplément de preuves ? Miss Halcombe et moi nous possédons quelques centaines de livres sterling…

Il me regardait avec une pitié à moitié contenue, et secouant la tête :

— Monsieur Hartright, me dit-il, réfléchissez là-dessus, même à votre point de vue. Si vous avez bien jugé sir Percival Glyde et le comte Fosco (ce que je suis loin d’admettre, prenez-y bien garde !) toutes les difficultés imaginables vous seraient suscitées, quand vous entreprendriez cette enquête nouvelle. On élèverait devant vous tous les obstacles que peut fournir la chicane ; on contesterait systématiquement chaque point du procès ; — et quand, avec le temps, nous aurions dépensé, non pas des centaines, mais des milliers de livres, le résultat final, suivant toute probabilité, serait contre nous. Les questions d’identité, quand elles se rattachent à des phénomènes de ressemblance personnelle, sont, en elles-mêmes, les plus difficiles à vider, — les plus difficiles, alors même qu’il ne s’y mêle aucune des complications dont se montre entouré le cas que nous discutons en ce moment. Je ne vois, en réalité, aucune chance d’éclaircir, d’une manière quelconque, cette affaire si bizarre. Même en supposant que la personne enterrée dans le cimetière de Limmeridge ne soit véritablement pas lady Glyde, vous établissez vous-même que, de son vivant, il existait entre elles une ressemblance extraordinaire. Nous ne gagnerions donc rien à obtenir les autorisations nécessaires pour la faire exhumer. Somme toute, monsieur Hartright, il n’y a pas là, réellement, matière à procès…

Résolu que j’étais à croire le contraire, je maintins la