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— À ce point, comme vous dites… Qu’est-ce qui vous fait rire ainsi ?…

Il ne fut pas répondu à cette question, et je n’entendais aucune sorte de bruit. Le comte, selon sa coutume, riait en dedans et sans le moindre éclat.

— Voyons, de quoi riez-vous ? répéta sir Percival.

— Eh ! mon bon ami ! peut-être des chimères que je me fais. Passez quelque chose à ma gaieté italienne… Est-ce que je ne viens pas de cette nation illustre qui jadis inventa l’exhibition de Polichinelle ?… Fort bien ; fort bien, fort bien !… J’ai de quoi reconnaître Anne Catherick quand je la verrai… Pour ce soir, c’est tout ce qu’il faut. Tranquillisez-vous, Percival ; dormez, mon fils, du sommeil du juste, et vous verrez ce que je ferai pour vous, dès que le jour viendra nous prêter ses clartés bienfaisantes. J’ai déjà ici, dans cette grosse tête que vous voyez, une foule de projets et de plans. Vous paierez ces billets, et vous retrouverez Anne Catherick, croyez-en ma parole d’honneur toujours sacrée ! Et, maintenant, suis-je ou ne suis-je pas un ami à loger précieusement dans le meilleur recoin de votre noble cœur ? Ne vaux-je pas bien ces prêts d’argent que, naguère encore, vous m’avez rappelés avec tant de délicatesse ? Quoi qu’il arrive, ne me froissez plus dans mes sentiments. Sachez les reconnaître, Percival ! Percival, sachez les imiter !… Je vous pardonne encore, je vous tends encore la main… Bonne nuit !…

Il n’y eut plus une seule parole prononcée. J’entendis le comte fermer la porte de la bibliothèque. J’entendis sir Percival assurant les barreaux des volets. Il avait plu tout ce temps, et à déluge. Ma position contrainte m’avait donné des crampes, et j’étais transie jusqu’aux os. Lorsque, pour la première fois, j’essayai de remuer, il m’en coûta un effort si pénible que je fus obligée de m’en tenir là. Je tentai pourtant une seconde épreuve, et parvins, cette fois, à me redresser à genoux sur le toit mouillé.

Quand je me fus traînée contre le mur, et au moment où, m’appuyant à lui, je me relevais, un regard que je