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mencer, ma robe de soie, attendu que, par cette nuit silencieuse, le moindre bruit qu’elle eût fait aurait pu me trahir. Je mis ensuite de côté ceux de mes vêtements de dessous que leur blancheur et leur volume rendaient plus particulièrement indiscrets ou incommodes, et je les remplaçai par un jupon de flanelle brune. Je jetai par-dessus ma pelisse de voyage, en étoffe noire, dont je ramenai le capuchon sur ma tête. Le soir, dans ma toilette habillée, je tenais au moins la place de trois hommes. Vêtue comme je l’étais maintenant, et quand je serrais contre mon corps ma frêle et souple enveloppe, aucun homme n’aurait pu, comme moi, se faufiler dans les moindres interstices. Ce point était fort essentiel, à cause du très-petit espace qui, sur le toit de la verandah, existait entre les caisses à fleurs d’un côté, de l’autre la muraille et les fenêtres du château. Si je venais à renverser quelque chose, à faire le moindre bruit, qui pouvait prévoir les suites d’un tel accident !

Je ne pris que le temps de placer la boîte d’allumettes près du flambeau que je soufflai ensuite, et je rentrai à tâtons dans mon boudoir. J’en fermai la porte au verrou, comme j’avais déjà fait pour ma chambre à coucher ; — et alors, me laissant tranquillement aller à l’extérieur de la fenêtre, je posai mes pieds, avec précaution sur le toit plombé de la verandah.

Mes deux chambres étaient à l’extrémité intérieure de l’aile nouvellement ajoutée au château, de celle-là même que nous habitions tous ; et j’avais à passer devant cinq fenêtres, avant d’atteindre le poste qu’il fallait occuper, immédiatement au-dessus de la bibliothèque. La première fenêtre était celle d’une chambre d’ami, pour le moment inoccupée. La seconde et la troisième étaient celles de la chambre de Laura. La quatrième éclairait la chambre de sir Percival ; la cinquième celle de la comtesse. Les autres, devant lesquelles je n’avais pas besoin de passer, appartenaient au cabinet de toilette du comte, à la chambre de bains, et à une seconde chambre d’ami, vide comme l’autre. Aucun bruit n’arrivait à mes oreilles, et l’obscurité de la nuit, lorsque je me trouvai debout sur