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peu plus âgé que je ne m’y attendais, ayant les cheveux assez rares sur le haut de la tête, les traits marqués, la figure fatiguée. Mais ses allures étaient aussi actives et son humeur aussi alerte que celle d’un jeune homme. La manière dont il répondit à l’accueil de miss Halcombe fut délicieusement simple et cordiale ; et lorsque je lui fus présenté, il se montra si bienveillant, il me mit si bien à mon aise, que nous nous trouvâmes ensemble sur le pied d’une vieille amitié. Miss Fairlie n’était point avec nous quand il arriva, mais elle entra dans l’appartement, environ dix minutes plus tard. Sir Percival se leva, et lui offrit ses hommages avec une grâce parfaite. L’inquiétude évidente que lui causait le changement fâcheux survenu dans l’aspect général de cette jeune personne, fut exprimée avec un mélange de tendresse et de respect, une délicatesse de ton, de voix, de gestes, qui faisaient autant d’honneur à son tact naturel qu’à sa bonne éducation. Je fus un peu étonné, dans de telles circonstances, de constater que miss Fairlie continuait à être gênée et mal à son aise devant lui, et de lui voir saisir le premier prétexte venu pour quitter de nouveau le salon. Sir Percival ne prit garde ni à la contrainte de son accueil, ni à cette brusque retraite qui nous l’enlevait. Présente, il ne l’avait pas fatiguée de ses attentions ; absente, il n’embarrassa miss Halcombe par aucune allusion gênante au départ de sa sœur. Son habitude du monde, son tact parfait ne se trouvèrent jamais en défaut, soit dans cette occasion, soit dans aucune autre, pendant tout le séjour que nous fîmes ensemble à Limmeridge-House.

Aussitôt que miss Fairlie eut quitté l’appartement, il alla au devant d’une question embarrassante pour nous, en nous parlant le premier de la lettre anonyme : « Parti du Hampshire, il s’était arrêté à Londres ; il y avait vu son avocat ; il avait lu les documents envoyés par moi, et il arrivait dans le Cumberland, pénétré du désir de donner toute satisfaction à nos inquiétudes en s’expliquant aussi nettement, aussi clairement que la parole humaine lui permettrait de le faire. » D’après cette déclaration formelle, je lui présentai la lettre originale que