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blessée par un marmot comme celui-ci !… Se tournant alors vers le petit Jacob, avec une expression de défi railleur, elle entreprit immédiatement de le catéchiser… — Allons ! disait-elle, je prétends approfondir toute cette affaire… Quand avez-vous vu l’esprit, méchant garçon ?

— Hier soir, à la brune, répondit Jacob.

— Ah ! c’était hier soir, et au crépuscule ? Eh bien ! de quelle couleur était-il ?

— Tout blanc, comme sont les esprits, répondit le voyeur de spectres, avec une confiance au-dessus de son âge.

— Et où était-il ?

— Tout là-bas, là-bas, dans le cimetière, — là où vont les esprits…

— « Là où vont les esprits » et « comme sont les esprits » ; — mais, petit imbécile, ne dirait-on pas que les mœurs et coutumes des esprits vous sont familièrement connues depuis votre plus jeune âge !… Vous savez, en tout cas, votre histoire sur le bout du doigt. Probablement, vous pourrez me dire, maintenant, de qui cet esprit était le fantôme ?

— Eh ! mais, oui, je le puis, répondit Jacob, secouant la tête, avec une expression de triomphe mélancolique.

M. Demspter avait déjà essayé, à plusieurs reprises, d’intervenir dans ce dialogue entre miss Halcombe et son élève ; il mit, cette fois, une certaine résolution à se faire, entendre.

— Veuillez m’excuser, miss Halcombe, dit-il, si je me permets de vous faire observer qu’en questionnant cet enfant, vous n’aboutissez qu’à l’encourager.

— L’interrogatoire touche à sa fin, monsieur Dempster, et une seule réponse me suffira désormais. Eh bien ! continua-t-elle, se tournant vers l’enfant, de qui avez-vous vu le fantôme ?

— C’était celui de mistress Fairlie, répondit Jacob à demi-voix.

L’effet que cette déclaration extraordinaire produisit sur miss Halcombe justifia pleinement l’insistance que l’instituteur avait mise à ne pas laisser aboutir l’interro-